Alternatives aux moteurs de recherche, des réseaux d’internautes collectent et organisent les contenus. La revanche des humains ?
Le web 2.0 a fait naître un paradoxe : la multiplication des contenus en ligne n’a pas entraîné la démocratisation de l’accès à ces informations. Au contraire, face au trillion de pages web disponibles, le système Page Rank de Google, c’est un peu l’éclairage à la bougie. Si les agrégateurs de type Del.icio.us, les systèmes de flux et les réseaux sociaux présentent à différents niveaux des alternatives enthousiasmantes, les visions futuristes de la recherche et de l’organisation de l’information sur la toile semblent s’organiser autour d’un paradigme d’apparence simple : l’homme ou la machine ?
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Les algorithmes complexes du web sémantique constituent un premier élément de réponse. Twine en est l’exemple le plus probant, fournissant à ses utilisateurs une information sur mesure établie d’après une analyse de leurs recherches personnelles. Mais si ce web automatisé est excitant, la nécessaire récolte d’informations sur l’internaute par un système centralisé peut apparaître gênante. Face à ce web automatisé, se développe la vision d’une organisation humaine de la toile dans laquelle les internautes seraient guidés non par des machines mais par d’autres internautes. Plusieurs groupements de journalistes proposent déjà les résultats de leurs veilles à travers des outils comme Aaaliens ou Publish2.
Pour autant, l’ambition “d’utiliser l’expertise des journalistes pour filtrer le web et donner du sens à l’information”, comme l’exprime le blogueur Narvic sur son site novovision.fr dans un article consacré à Publish2, demeure encore dévolue à une communauté éditrice restreinte.
Armée d’une vision plus large, la start-up française Pearltrees a pour ambition de développer ce principe à l’échelle planétaire, créant une communauté dont la nature serait de collecter et d’organiser des contenus intéressants. “Il s’agit de passer d’un contenu généré par l’utilisateur à l’organisation de ces contenus par les utilisateurs”, explique Patrice Lamothe, pdg de Pearltrees. Le principe est simple : grâce à un plug-in, l’internaute peut “perler” (bookmarker) les résultats de ses recherches, pour en dresser l’arborescence sous la forme d’une carte en deux dimensions. Il est alors possible, pour d’autres utilisateurs, de suivre cette navigation comme une série de diapositives, de visiter les sites perlés ou de récupérer telle perle pour l’intégrer à sa propre carte. S’il s’agit a priori d’un système de bookmarking sophistiqué et ludique, le partage de ces cartes à travers une communauté étendue en modifie considérablement la portée.
La signalisation, via un code couleur, des perles ou liens déjà intégrés dans d’autres cartes en fait d’abord un puissant outil de recherche : “Croiser un utilisateur à un endroit spécifique du web signifie que nous nous intéressons à un même sujet. Il y a donc de fortes chances que sa carte contienne d’autres perles qui m’intéressent.”
A une échelle plus large, ces interconnexions promettent de changer notre manière de naviguer : on ne se déplace plus d’après l’avis de Google ou de tel expert, mais d’après celui de gens croisés sur ces noeuds d’intérêts. Avec, en filigrane, une fin probable de la recherche classique (du “search”) : “Une fois parvenu à un fort niveau d’interconnexion, on ne cherche plus”, s’enthousiasme Patrice Lamothe. “On demande à ses amis, comme on le fait dans la vie ; on questionne ses communautés d’intérêt, mais on n’ouvre plus les pages jaunes.” Se demandera-t-on alors pourquoi, auparavant, nous passions tous par la même porte ?
Pearltrees a ceci d’excitant qu’il symbolise l’aboutissement d’un principe originel du web. Il y a vingt ans, le web n’était encore qu’un réseau réservé à une élite scientifique resserrée autour de Tim Berners-Lee, une toile confidentielle que chacun enrichissait, éditait, organisait. Le rêve d’une édition du web par les internautes eux-mêmes ne propose pas autre chose que d’étendre ce principe de microdémocratie à l’échelle planétaire. Go pearl !
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