Viaticum

Désormais, le trio suédois du pianiste Esbjörn Svensson remplit les salles et cumule les prix. Le pianiste vit cette effervescence avec un calme nordique. Lorsqu’ils ne sont pas sur la route cent jours par an ? c’est le maximum, selon un pacte scellé entre eux ?, les trois musiciens (Svensson donc, Dan Berglund à la basse, et Magnus Oström à la batterie) mènent une existence paisible avec femme et enfants.

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Leur musique ? équilibre finement ciselé à partir d’une écriture mélodique accrocheuse, presque enfantine, tissée de moments d’évasion et de songe ? se perfectionne d’album en album, mais semble conter la même histoire. Dès les premières notes, le style ailé du pianiste nous emporte dans son sillage comme les premières pages d’un roman qu’on ne lâche plus. Pensés et construits à trois, les chapitres du nouvel E.S.T. ? le trio a suffisamment suscité l’adhésion d’un public jeune pour se faire reconnaître sous ce nom court et rassembleur ? s’égrènent dans une douceur que rien ne heurte.

Cette quiétude apparente, Svensson et ses partenaires la dispensent sans calcul. Leur démarche sereine, nullement pressée par une attente grandissante autour de leurs prestations, est sans doute le fruit d’une identité scandinave plus encline à la distance qu’à la confrontation. Ce trio est en quelque sorte mature avant l’âge. Presque trop ? Malgré une vraie modernité dans l’énoncé, des harmonies voisines de la pop, l’ajout de stridences par des amplifications discrètes, des effets de réverbération, la musique d’E.S.T. est plus posée que fougueuse, presque scénarisée. Les références à des groupes de rock actuels sont communes à celles affichées par Brad Mehldau. Un artiste de référence pour Svensson.