Dans un discours relayé par son cabinet lundi, David Cameron a pressé les moteurs de recherches de collaborer à la lutte contre la pédopornographie sur Internet en bloquant toute requête ou contenu concernant des abus sexuels sur mineurs. Un nouveau coup de pression politique dans la lutte contre la pédopornographie via Internet en Europe.
Depuis plusieurs mois déjà Cameron traque les géants du net, alors que l’émotion est encore vive en Angleterre. Le pays vient d’être secoué par deux procès mettant en cause les meurtriers de deux fillettes, accusés d’actes pédophiles et de pédopornographie: April Jones (5 ans) et Tias Sharp (12 ans). Dans le premier cas, des images de jeunes filles nues et de pornographie infantile avaient été retrouvés dans l’ordinateur du coupable. Dans l’autre, deux cartes mémoire renfermaient des clips montrant des actes sexuels sur des adolescentes. David Cameron a fermement réaffirmé ce lundi sa volonté d’obliger les moteurs de recherche internet à mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour lutter contre la pédopornographie en ligne. « Un devoir moral » pour le chef du gouvernement britannique.
Ce dernier vise les grandes firmes numériques telles que Yahoo, Bing, ou encore Google. L’entreprise californienne a d’ailleurs répondu être déjà engagée dans ce combat. En juin dernier, Google a en effet révélé au journal The Telegraph que ses ingénieurs planchaient sur un nouveau système facilitant la suppression définitive d’images impliquant des enfants, à partir d’une nouvelle base de donnée prochainement accessible à ses concurrents. « Cela devrait permettre aux entreprises, aux autorités et aux organisations caritatives de collaborer davantage et de prendre des mesures communes contre les criminels » , a insisté Jacquelline Fuller, directrice de Google Giving sur le blog officiel de la firme. Selon le quotidien britannique, Google finance également The Internet Watch Foundation, un organisme qui surveille tous les contenus illégaux en ligne. Internet Watch devrait ainsi recevoir 1,2million d’euros sur une durée de quatre ans en soutien à sa démarche.
Les Etats-Unis, en tête de l’hébergement de contenus pédopornographiques
Mais les efforts de Google ne suffisent pas à masquer l’explosion des infractions pédo-sexuelles sur Internet depuis plusieurs années. Pour Interpol, le web facilite très largement ce genre d’infractions :
« Les auteurs peuvent non seulement diffuser et consulter plus facilement des contenus à caractère pédosexuel, mais ils peuvent également entrer directement en contact avec des enfants par l’intermédiaire des sites de conversation en ligne et des réseaux sociaux », précise l’organisation sur son site internet.
Identifié dès 1997 en France par l’ Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP), suite aux retentissements provoqués par l’affaire Dutroux, le phénomène est en croissance constante en Europe. D’après Pointdecontact.net, une plateforme de signalement mise en place par l’Association des Fournisseurs d’Accès et de Services Internet (AFA), 36,7% des contenus qu’elle qualifie d’illégaux sont pédopornographiques (chiffres 2012). De plus, les Etats-Unis arrivent en tête en matière d’hébergement de contenus pédopornographiques (30%), suivis des Pays-Bas (7%) et de la Russie (6.3%).
Pédopornographie vs. neutralité du Net?
Face à l’augmentation des flux de contenus illégaux sur la Toile, l’Union Européenne a lancé un projet « d’alliance globale » de 48 pays contre la pédopornographie et les abus sexuels sur Internet. En décembre dernier, la commissaire européenne aux affaires intérieures, Cecilia Malmström, a appelé à un engagement politique fort des Etats. Le but de l’initiative est de participer activement à « l’identification rapide des victimes, la poursuite des auteurs d’actes pédophiles et la meilleure sensibilisation du public a ces dangers », d’après Frédéric Malon, chef de l’OCRVP. Une décision rapidement remise en cause par les défenseurs de la neutralité d’Internet , d’après le Monde. A l’époque, le Parti Pirates avait d’ailleurs mis en garde la commission européenne contre les dérives d’une surveillance systématisée des contenus circulant sur Internet:
« Les Pirates clament que la censure produit surtout des conditions extrêmement dangereuses pour la démocratie (…) Régulièrement, la pédophilie et la violence sont hélas instrumentalisées par le législateur pour faire voter des lois de surveillance des citoyens et de censure des contenus ».