Une femme, qui se prostitue par nécessité vitale, emmène son enfant au travail. Un de ses fidèles clients est un ayatollah. Un patriarche regarde des clips érotiques et zappe sur une chaîne religieuse dès que son épouse conservatrice rentre à la maison. Un jeune musicien boit, se dope, baise et ne rêve que de ficher […]
Une vue en coupe acide de la capitale iranienne contemporaine dans un film d’animation réaliste très prenant.
Une femme, qui se prostitue par nécessité vitale, emmène son enfant au travail. Un de ses fidèles clients est un ayatollah. Un patriarche regarde des clips érotiques et zappe sur une chaîne religieuse dès que son épouse conservatrice rentre à la maison. Un jeune musicien boit, se dope, baise et ne rêve que de ficher le camp. Une jeune femme tombe enceinte accidentellement et cherche le moyen d’apparaître vierge à son futur mari… Ce sont là quelques-uns des personnages qu’Ali Soozandeh fait se croiser à Téhéran, en une sorte de mix entre Short Cuts (Robert Altman, 1993) et Tartuffe.
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A travers eux, tel Molière en son temps, le réalisateur montre habilement l’hypocrisie de la société iranienne en particulier et du puritanisme en général : condamner le sexe en société au nom de principes moraux supérieurs mais ne penser qu’à ça en privé. Ce faisant, il rend également hommage à l’inventivité des peuples quand il s’agit de contourner des règles invivables et la coercition policière qui va avec.
Téhéran tabou vaut non pas seulement par son scénario remarquable, qui dit les choses sans “vouloir dire”, mais aussi par son esthétique d’animation réaliste. Soozandeh a utilisé le procédé de la rotoscopie, qui consiste à dessiner les personnages d’après des prises de vue réelles avec des acteurs, puis à dessiner ensuite les décors et arrière-plans.
Le choix de l’animation découlait peut-être de l’impossibilité de tourner un tel film à Téhéran, contrainte féconde qui a abouti à une réussite artistique, un peu à l’image des Persepolis (BD et film) de Marjane Satrapi, mais dans un style très différent. Soozandeh s’est ainsi montré aussi malin que ses personnages, et Téhéran tabou rejoint les plus grandes réussites du cinéma iranien contemporain.
Téhéran tabou d’Ali Soozandeh (All., Aut., 2017, 1 h 36)
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