L’adjoint au maire de Paris Christophe Girard demande la suspension et l’annulation des négociations exclusives entre France Télévisions et le consortium Stéphane Courbit/Publicis pour la vente de la régie pub.
L’affaire traîne depuis quelques mois, nourrie par les révélations successives de Mediapart (accès payant), du Monde (accès payant) et du Canard Enchaîné. Pas sexy et compliqués à dépeindre, les conflits d’intérêts entre dirigeants de France Télévisions, candidats au rachat de la régie pub et pouvoir politique. L’adjoint au maire de Paris Christophe Girard veut clarifier cet imbroglio en saisissant le Conseil d’Etat.
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Au commencement, il y avait la fin de la publicité sur les chaînes publiques, décidée en janvier 2008 par Nicolas Sarkozy sur les conseils d’Alain Minc. Déjà supprimée après 20 heures depuis le 5 janvier, la publicité doit disparaître en journée à partir de novembre 2011.
Conséquence moins médiatisée de cette mesure : la vente partielle de la régie France Télévisions Publicité (FTP), entièrement détenue par le groupe public. 70% du capital de FTP doit être cédé à un groupe privé, France Télévisions conservant 30% de sa filiale.
En novembre 2009, quatre candidats se disputent le bout de gras : Hi-Média, Next-Radio TV, Lagardère et le producteur Stéphane Courbit, patron de la Financière Lov et ex-patron d’Endemol-France (Loft Story). Faute d’expérience dans le domaine publicitaire et handicapé par son image de « patron de la téléréalité », ce dernier s’est allié au groupe Publicis.
Le candidat favori de l’Elysée
FTP, qui compte 290 collaborateurs, réalise un chiffre d’affaires annuel de 400 millions d’euros, avec un taux de régie plus qu’intéressant. Tant qu’il y aura de la pub sur France Télévisions dans la journée, les chaînes publiques reverseront 19% des contrats de vente de l’espace publicitaire à la FTP. Et la pub pourrait continuer au-delà de la date prévue.
Par ailleurs, après la suppression de la pub, FTP conservera la régie des écrans pubs régionaux, des chaînes thématiques du câble et du satellite, ainsi que les parrainages (Le Canard enchaîné, 6 janvier).
Depuis le 3 février, France Télévisions a ouvert des négociations exclusives avec le duo Courbit/Publicis. Problème. Plusieurs enquêtes journalistiques montrent que la procédure a favorisé ce consortium, seul candidat reçu par le PDG de France Télévisions.
Alors que l’Agence des participations de l’Etat et le PDG de France Télévisions, Patrick de Carolis, avaient une préférence pour le projet d’Hi-Media (régie publicitaire spécialiste d’internet), l’Elysée aurait poussé en faveur du tandem Courbit/Publicis. Fin janvier, quatre syndicats de France Télévisions (CFDT, SNJ, CFE-CGC et Sud) ont dénoncé les « très douteuses conditions qui entourent l’affaire ».
Pourquoi ? Alain Minc, proche du chef de l’Etat qui lui aurait soufflé l’idée de supprimer la pub, conseille également Stéphane Courbit. Lui-même ami de Sarkozy et présent lors de la nuit au Fouquet’s du 6 mai 2007. Alain Minc aurait eu un rôle actif dans les négociations sur la cession de FTP, bénéficierait d’un plan d’actions gratuites et d’un contrat de travail au sein de la holding de Courbit, selon l’enquête de Laurent Mauduit pour Mediapart. Courbit reconnaît un accord avec Minc, mais l’homme d’affaires nie toute intervention dans le processus.
Au Conseil d’Etat
Christophe Girard, dénonçant « une atteinte à la libre concurrence » et « un détournement de l’usage de la redevance », a décidé de saisir le Conseil d’Etat. L’adjoint au maire de Paris réclame la suspension puis l’annulation des négociations exclusives entre France Télévisions et le consortium Courbit/Publicis.
Christophe Girard s’appuie notamment sur une décision du Conseil d’Etat du 11 février. Elle annule (une mesure symbolique) l’arrêt de la pub après 20 heures dès le 5 janvier 2009 alors que la loi qui la prévoyait n’est entrée en vigueur qu’en mars 2009. La ministre de la Culture et de la Communication d’alors, Christine Albanel, avait réclamé cette suppression précoce dès le 15 décembre 2008 dans une lettre adressée aux dirigeants de France Télévision.
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