Le groupe Condé Nast lance mercredi la version française du magazine américain Vanity Fair : une institution de la presse, mêlant glamour et enquêtes, aujourd’hui adaptée au lectorat hexagonal. Au menu de ce premier numéro : Scarlett Johansson, le majordome de Liliane Bettencourt et des textes d’Alain Badiou et Catherine Nay.
« Brillant dehors, mordant dedans.” La promesse, affichée sur son site internet, était à peu près la seule chose visible depuis l’annonce du lancement de Vanity Fair en France. Pour le reste, la “VF de VF” dévoilée mercredi dans les kiosques se préparait dans la plus grande discrétion, avec une équipe constituée pourtant depuis huit mois.
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Pour le mordant, la rédactrice en chef Anne Boulay est allée chercher Hervé Gattegno et Olivier Bouchara, respectivement nommés rédacteur en chef enquête et investigation et chef de la section reportage. Pour le brillant, Virginie Mouzat dirigera la mode et une direction artistique de haut vol. Michel Denisot endossera bien sûr le rôle de Graydon Carter, célèbre directeur du Vanity Fair américain, fleuron du groupe Condé Nast, propriétaire également de GQ, Glamour, AD…
En adaptant le mythique mensuel en France, Xavier Romatet, président de Condé Nast France, entend réconcilier “l’information et le glamour”, qui, selon lui, vont rarement de pair.
“En France, juge-t-il, nous avons soit une presse dont on dit qu’elle est belle, mais qui est assez creuse, soit une presse d’investigation sérieuse mais qui est plutôt moche.”
Pour y parvenir, Xavier Romatet a conservé les recettes efficaces de ce magazine centenaire qui, chaque mois, se vend à 1,25 million d’exemplaires outre-Atlantique.
“Vanity Fair est un concept compliqué et exigeant”, poursuit-il. Une forme hybride en effet, qui mêle enquêtes fouillées, longs récits à cheval entre le reportage et la nouvelle, contributions extérieures (d’illustrateurs, d’écrivains) et interviews people. Le tout avec la photo comme élément éditorial.
Seul “twist” dans la version française ? Une plus grande place accordée à la culture et à la mode (une série “sans mannequin”, précise-t-on, y sera consacrée chaque mois) pour un lectorat français “plus sophistiqué que les Américains”, selon Xavier Romatet. “Surtout, explique Anne Boulay, nous avons énormément travaillé pour adapter un mélange des genres qui ne nous est pas du tout familier dans la presse française. A l’arrivée, il y a de la politique dans la mode, de la mode dans la politique, de la culture un peu partout…”
C’est donc Scarlett Johansson qui fait la Une de ce premier numéro (obtenu après quatre numéros 0). L’occasion d’en apprendre un peu plus sur son rapport à Paris où elle vient d’acheter un appartement vers Saint-Germain des Prés. Un quartier huppé où la population n’est pourtant pas exempte de nuisances sonores. En témoigne l’accroche de couv : « Je vis au dessus d’un café où on joue de l’accordéon. » Tellement français. Si l’auteur du portrait de l’actrice écrit déjà pour le Vanity Fair américain, le contenu de ce numéro est bien 100 % français. “Néanmoins, nous n’avons pas de religion là-dessus, précise la rédactrice en chef. Si un jour nous avons envie de reprendre un récit issu du journal américain, nous le ferons.” En couverture, la posture est la même : “On ne s’interdit ni une star américaine, ni une star venue d’ailleurs, ni un vieux, rien du tout.” Alors, pour faire connaître et mettre dans un maximum de mains ce nouveau mensuel méconnu de la plupart des Français, le premier numéro – sous embargo jusqu’à la veille de sa sortie – a été tiré à 400 000 exemplaires et se vendra 2 euros au lieu de 3,95.
Pour cette troisième version européenne – après l’espagnole et l’italienne –, le groupe Condé Nast a investi 15 millions d’euros. “Si Vanity Fair pouvait faire comme GQ (qui se vend à 100 000 exemplaires par mois – ndlr), alors ce serait formidable”, rêve-t-on chez Condé Nast, avec un objectif de vente de 85 000 exemplaires par mois la première année et un équilibre à 100 000 en trois ans.
Pour l’heure, la rédaction – très réduite, qui fonctionne comme un hub – est, elle, plongée dans les numéros de septembre et octobre. Quant à Anne Boulay, elle attend avant de se réjouir : “Pour avoir lancé un magazine (GQ – ndlr), confie-t-elle, je sais que ce qui compte, c’est le numéro 6. Passé l’excitation et la curiosité, en janvier, février, là on verra si ça marche.” Rendez-vous est pris.
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