Coming on strong

Attention : Coming on Strong provoque des hallucinations. On écoute ainsi ce premier album et on a des visions. On voit clairement le studio des Londoniens Hot Chip : les étagères se sont écroulées et leurs disques de Prince, The Normal, Sun Ra, N.E.R.D, Magnetic Fields, Ween, Stevie Wonder, Daft Punk, Palace Brothers, Grace Jones, Vashti Bunyan ou Stereolab sont tombés en une fascinante montagne, se mélangeant allègrement les pochettes.

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Et c’est ce qui réjouit tant dans cette électronique-là : cette douce impression qu’enfin tout peut arriver au prochain tournant ? d’une ballade minimale et bouleversante comme The Beach Party ou Shining Escalade à un tube électro-pop sautillant comme You Ride, We Ride, in My Ride. En passant par ce tube étrange, Playboy, et son refrain infernal : « Au volant de ma Peugeot, j écoute Yo La Tengo« ? Voilà qui change des autoroutes sagement délimitées par des beats et blips identiques.

Loin des frigides créatures péniblement élaborées en studio par des apprentis laborantins aux gestes cliniques et aux exercices de style frimeurs, les chansons de Hot Chip sortent de ce studio-refuge avec une élégance, une félinité et une humanité ravissantes. Pas de revivalisme ici, pas de vaine science-fiction non plus : juste l’envie de proposer à la pop-song des terrains de jeux plus hauts, plus vastes, plus vierges ? qu’ils soient baignés d’une douce et chaleureuse lumière ou gagnés par la banquise.

Regorgeant de trouvailles soniques, de dérèglements rythmiques et d’excentricités vocales, ces chansons possèdent ainsi une âme, un corps, de l’humour et des humeurs. Comme chez leurs idoles Can, Kraftwerk ou Neptunes, c’est ici même, à ce point d’équilibre miraculeux entre le charnel et le robotique, le fragile et le martial, l’acoustique et l’électronique, que se joue Coming on Strong. Le nom de famille de Joe est Goddard : dans l’electro aussi, on attendait cette nouvelle vague.