Pourquoi l’été est la pire des saisons et comment s’en consoler, voire la traverser sans être tenté par l’héroïne ou le suicide.
L’été arrive avec son lot d’inégalités : on est seul alors que les autres, en couple, n’ont pas à se poser la question « avec qui je pars ? » ; on n’a pas un euro pour partir, alors que les autres vous exposent qu’ils iront à New York, en Thaïlande ou à Formentera, parce que « tu comprends, Capri, l’année dernière, il y avait vraiment trop de monde » ; on part en Bretagne ou en Normandie « pour les enfants, pour la grand-mère, pour la maison de famille » et il pleut tous les jours ; on part en couple et on n’a rien à se dire alors que les deux amoureux sur le transat en face n’arrêtent pas de s’embrasser et d’éclater de rire ; on part pathétiquement heureux d’avoir perdu 1,5 kg et on se retrouve sur une plage du Brésil entouré de garçons et de filles au corps sublime, qui nous renvoient à la figure que c’est de 15 kg qu’on aurait dû s’alléger.
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Il fait beau, les pêches sont délicieuses, on peut porter à nouveau nos sandales préférées, n’empêche que l’été est la saison la plus cruelle de l’année : la saison de toutes les comparaisons. Et la comparaison, on le sait, est un poison qui tue lentement et, autant le dire, inutilement.
Vouloir traverser l’été en état de coma éthylique pour s’épargner tout sentiment d’injustice reste une option. Mais pas la meilleure. Non, on évitera la drogue ou l’excès d’alcool. Quant au suicide : complètement idiot, puisque dès septembre tout ira mieux. Le seul remède, pour penser à autre chose sans « s’évader » (ce cliché insupportable), c’est de lire ou relire ces auteurs qui nous montrent la vie dans toute sa beauté mais aussi toute sa dérision. Bref, dans toute sa vérité.
Il y a des livres avec lesquels on se sent moins seul, on se sent enfin compris, mieux compris, que par sa famille, ses enfants, son conjoint, son chien, et toutes ces familles qui pique-niquent sur une affreuse plage de galets.
L’été, il faut lire ou relire Proust, Nabokov, Flaubert, Fitzgerald… et aussi, au rayon contemporain, Bret Easton Ellis, Will Self, Michel Houellebecq, Philip Roth. On relira encore le magnifique La Traversée de l’été de Truman Capote. Un été caniculaire à New York, sur fond de jazz et de cris d’animaux sauvages au zoo, dans un grand appartement chic de l’Upper East Side, se joue un amour fou et maladroit entre deux très jeunes gens. Elle est issue d’un milieu riche, lui d’un milieu pauvre de Brooklyn.
La traversée de l’été s’achèvera en plongeant leur voiture dans l’Hudson. Comme quoi, c’est peut-être pas si mal d’être seul, vieux, gros, et en Bretagne.
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