Les taxes qui doivent compenser la fin de la pub sur France Télévisions rapportent pour l’instant moins que prévu. La pub avant 20h pourrait avoir de belles heures devant elle…
A deux jours de l’arrivée de Rémy Pflimlin à la présidence de France Télévisions, le financement des chaînes publiques est de nouveau remis en cause. La Tribune de ce vendredi révèle que les taxes censées compenser la disparition de la pub ne rapportent pas autant qu’espéré : 215 millions d’euros en 2009, contre les 450 millions d’euros attendus. Et seulement 366 millions estimés pour 2010. Des chiffres qui ne tiennent pas la route face aux 800 millions d’euros que rapportait la publicité en 2008.
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Suite à la suppression de la pub après 20h sur les chaînes publiques, mise en place le 5 janvier 2009, deux impôts devaient prendre le relai du financement :
• une taxe sur les recettes publicitaires des chaînes privées, qui devaient mécaniquement augmenter, une fois France Télévisions hors-jeu.
• Une taxe sur le chiffre d’affaires des opérateurs télécoms.
« On a la confirmation que ce mode de financement est aléatoire, pour 2009 comme pour 2010. Le système économique mis en place par Nicolas Sarkozy à France Télévisions va créer des déséquilibres majeurs », commente Jean-François Téaldi, Secrétaire général de la CGT France Télévisions.
Le quotidien économique évoque trois causes à ces résultats décevants :
• le lobbying de TF1, M6 et Canal Plus leur a permis de revoir à la baisse leur taux d’imposition, passé à 0,5% des recettes de la pub. Résultat : au lieu des 80 millions attendus en 2009, la taxe n’a rapporté que 28 millions d’euros.
• Les opérateurs télécoms ont également fait pression pour réduire l’assiette de leur taxe (exit les revenus des services audiovisuels, de la vente et de la location d’équipement, entre autres). La contribution n’a rendu que 186 millions en 2009, contre les 380 millions attendus.
• Enfin, les taxes n’ont été imposées qu’à partir de mars 2009, lorsque la loi est officiellement entrée en vigueur. De même, leur prélèvement trimestriel fait compter le dernier trimestre 2009 pour le budget 2010.
Le prévisible manque à gagner devrait être remboursé par l’Etat, qui assure le budget de France Télévisions.
Vers un maintien de la pub avant 20h ?
Ces résultats vont dans le sens des partisans du maintien de la pub avant 20h. En avril, des députés UMP se sont élevés avec Jean-François Copé contre la suppression de la publicité en journée, programmée pour fin 2011, après le passage au tout numérique. L’argument du coût pour l’Etat n’a pas laissé Bercy indifférent. Selon Le Point, même l’Elysée serait prêt à retarder la suppression de la pub en journée d’un ou deux ans.
Nicolas Sarkozy se laisserait-il rattraper par le « principe de réalité » qu’invoquait le PS ? Ce serait pourtant retourner sa veste en beauté. En 2008, lorsqu’il annonçait la suppression de la publicité, prenant le contre-pied de la gauche, le président de la République déclarait : « La télévision publique ne peut pas fonctionner selon des critères purement mercantiles. » Il appuyait sur le caractère « révolutionnaire » du nouveau mode de financement, et sur sa détermination :
« Il faut savoir ce qu’on veut, lançait-il. On veut changer ou on veut continuer. Je veux changer. »
Dans ce discours, il assénait : « Nous aurons des résultats, et nous assumerons les conséquences de ces choix stratégiques. »
Le résultat le plus étonnant reste le bond des recettes publicitaires avant 20h. Depuis la suppression de la publicité en soirée, les annonceurs ont massivement migré sur la journée, rapportant 24% de plus en 2009, soit 318 millions d’euros. Une surprise pour France Télévisions. Tout compte fait, « la suppression de la publicité ne coûtera que 200 millions par an », selon une source gouvernementale citée par la Tribune.
Si la décision finale revient au gouvernement, Rémy Pflimlin devra faire face dès sa prise de fonction à la CGT, qui réclame le maintien d’un « financement en binôme publicité et redevance ». Cette dernière s’avère « extraordinairement basse par rapport aux autres pays européens », selon Jean-François Téaldi, qui milite pour son augmentation.
Epineuse privatisation de la régie pub
En cas de maintien de la publicité avant 20h, une autre question délicate devrait être rapidement réglée : la privatisation à 70% de la régie publicitaire. La CGT l’estime « scandaleuse tant ses revenus sont vitaux pour France Télévisions ». Une opinion suivie entre autres par Christophe Girard, adjoint au maire de Paris en charge de la Culture, opposé à ce que ces capitaux public s’envolent vers des acteurs privés.
Rémy Pflimlin s’est lui-même engagé durant une audition devant le CSA à demander un moratoire sur la privatisation si la publicité était maintenue en journée. Ca ne devrait pas être du goût du repreneur de la régie, Stéphane Courbit. Au contraire, lui ne voit pas pourquoi le maintien de la publicité en journée l’empêcherait de privatiser la régie pub, en l’absence de conflit d’intérêt. Le sort du financement de France Télévisions devrait être fixé début septembre, lors du vote du budget pluriannuel 2011-2013.
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