Nous poursuivons notre tour des France des grandes villes avec Marseille. Alors que Jean-Claude Gaudin pense pouvoir décrocher un quatrième mandat, la gauche tente d’incarner le renouveau.
1. Jean-Claude Gaudin, âgé et usé
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Jusqu’à présent, la longévité des maires, trente-quatre ans pour Defferre, dix-huit pour Gaudin, semble montrer que les Marseillais préfèrent souvent la fidélité au changement. Jean-Claude Gaudin, le maire sortant UMP, pense donc, à 74 ans – dont 50 en politique – pouvoir enchaîner avec un quatrième mandat. “Je ne vois pas pourquoi on voudrait mettre les gens de plus de 70 ans dans des maisons de retraite ou dans des ‘sénioriales’”, ironise-t-il.
Pour contrer ce vieillissement, le sénateur UMP mise sur une garde rapprochée, jeune et dynamique, et sur l’impopularité du gouvernement de François Hollande.
2. Un coup de pouce du gouvernement
Depuis son entrée en fonctions, le gouvernement socialiste s’est fixé comme objectif de récupérer la deuxième ville de France. Pour cela, il ne lésine pas sur les moyens. C’est ainsi que Jean-Marc Ayrault a débarqué en novembre dernier avec une hotte remplies de cadeaux. Au programme, l’annonce de plusieurs milliards d’euros dans les transports, l’emploi et la sécurité. De quoi faire enrager Jean-Claude Gaudin : “Ce déplacement n’est qu’une tournée électorale destinée à soutenir le candidat socialiste”, avait-il lancé.
3. 2013, année du renouveau
Plus de 6 millions de visiteurs pour 900 événements culturels organisés sur le territoire Marseille-Provence. S’il y a bien un sujet sur lequel le bilan du dernier mandat de Jean-Claude Gaudin bénéficie d’un point positif, c’est bien la culture et la transformation de la ville. Mucem, Villa Méditerranée, J1. Même si la programmation de ces lieux a parfois été jugée décevante, l’année “capitale” a indéniablement boosté l’image et l’offre culturelle de la ville. “MP 2013 n’est pas une fin, c’est un démarrage. Et il faut imaginer la suite car le renouveau de Marseille est intimement lié à cette réussite”, soutient l’équipe du maire sortant.
4. Des socialistes sur le qui-vive
Marseille fait partie des villes qui peuvent basculer. Selon un dernier sondage, le candidat socialiste Patrick Mennucci (41 %) devancerait d’une courte tête Jean-Claude Gaudin. Député depuis 2012, Patrick Mennucci, 58 ans, réputé bosseur, promet “un nouveau cap” pour Marseille. S’il est certain que l’âge avancé de Jean-Claude Gaudin et le bilan mitigé de son dernier mandat offrent un véritable avantage au candidat PS, celui-ci doit faire en sorte que les querelles internes à la fédération socialiste ne plombent pas ses chances de décrocher la mairie. Mais ce qu’il redoute le plus, c’est Pape Diouf et la possibilité que l’ancien directeur de l’Olympique de Marseille conduise une liste de rassemblement des forces de gauche.
5. Des inégalités criantes
C’est sans doute le principal défi pour la ville. Selon un récent rapport de l’OCDE, la métropole marseillaise est “l’une des plus inégalitaires de France” ce qui risque de lui poser “des défis considérables pour la croissance soutenable de son territoire”. Et même si la métropole a connu la deuxième plus forte croissance des villes européennes depuis douze ans, elle n’en reste pas moins fracturée. Alors que 28 % des Marseillais vivent sous le seuil de pauvreté, la cité phocéenne est la quatrième ville de France pour le nombre de contribuables soumis à l’ISF.
Pour Patrick Mennucci, “l’impératif” est donc de “créer suffisamment d’emplois privés, condition du redressement de Marseille”. Il mise ainsi sur la création de 50 000 emplois salariés privés en deux mandats. De son côté, l’UMP refuse de chiffrer ses objectifs tout en promettant l’installation d’un conseil économique auprès du maire.
6. Le FN se fait discret
Entré tardivement dans la campagne, Stéphane Ravier, candidat FN au municipal, crédité entre 20 et 25 % dans les sondages, accumule depuis peu les contrariétés. Une hécatombe a décimé ses listes. Après le retournement d’Anna-Rosso Roig, transfuge du PC, deux autres candidats ont disparu et un troisième n’a pas été sélectionné. Aujourd’hui, le Front national n’a qu’un seul représentant au conseil municipal.
7. Une gestion calamiteuse
Finances en berne, “pratiques irrégulières” dans les comptes, c’est le constat amer d’un rapport publié, en octobre dernier, par la chambre régionale des comptes. Une aubaine pour la gauche qui a fait de la gestion de la ville et de sa gouvernance, un thème de campagne. Le candidat PS Patrick Menucci s’engage notamment à revoir la politique de recrutement des fonctionnaires et souhaite créer un poste d’adjoint délégué à la “transparence”. Et, surtout, il promet d’en finir avec la toute-puissance du syndicat FO, majoritaire chez les territoriaux.
De son côté, l’équipe du maire sortant défend son bilan et estime que « la gestion de la ville est certes tendue, mais rigoureuse et bonne ». Sur la dette, qui avoisine les 1,8 milliard d’euros, selon Yves Moraine, maire du 4e secteur, “elle était déjà lourde à l’arrivée de Gaudin, et notre ville dont le potentiel fiscal est faible avait besoin d’être équipée”.
8. Une jeunesse qui décroche
En finir avec le décrochage scolaire, c’est le principal enjeu du futur maire de Marseille. Selon l’OCDE, les problèmes d’éducation expliquent en partie le sous-emploi. Le taux de non-diplômés parmi les plus de 15 ans ayant quitté l’école, déjà élevé à Marseille (24 %), atteint 39 % pour l’ensemble des quartiers Nord. Ce sont les élèves en décrochage qui se tournent davantage vers le marché de la drogue, “pourvoyeur d’emploi” dans les cités des quartiers populaires.
Jean-Claude Gaudin propose l’ouverture d’une “école de la deuxième chance” et un fonds initiative “Les jeunes talents de Marseille” pour soutenir entre autres les jeunes issus des quartiers populaires.
9. Des transports insuffisants
Jusqu’en 2013, le métro s’arrêtait, les jours de semaine, dès 22 heures. De quoi handicaper les Marseillais… Et même si les horaires se sont étendus, l’offre de transport reste insuffisante. Du côté du PS, Patrick Menucci veut ainsi favoriser les liaisons entre les quartiers en prolongeant le métro dans les quartiers Nord et le tramway dans les quartiers Sud mais ne chiffre pas le coût de l’opération.
Dans son bilan, Jean-Claude Gaudin insiste sur la relance du chantier de rocade de contournement de Marseille dont la livraison est prévue pour 2017. Le coût de ce projet, imaginé il y a trente ans, devrait, au final, couter 1 milliard d’euros. L’objectif du projet de métropole Aix-Marseille est également de développer les transports et ainsi favoriser la croissance de l’emploi.
Car selon l’OCDE, “77 % de la population habitant en zone périurbaine n’a aucun accès aux transports publics, 14 % de la population a une accessibilité limitée et 2% seulement à une accessibilité élevée.”
10. Une insécurité préoccupante
Dix-sept règlements de compte mortels en 2013, déjà un en 2014 mais une éclaircie. Le procureur de la République de Marseille a annoncé, en début d’année, une baisse de 4,12 % de la délinquance. Marseille n’est pas, selon lui, “la capitale de l’insécurité”. “Le taux de criminalité moyen pour 1 000 habitants, de 2010 à 2012 était de 89 à Nice, 88 à Marseille, 87 à Lyon intra-muros, 84 à Toulouse et de 80 à Paris”, a-t-il rappelé.
Même si les candidats ont leur avis sur la question, jusqu’à présent, il n’ont pas fait de l’insécurité un thème de campagne primordial. Jean-Claude Gaudin qui se plaint du manque d’effectifs de police renvoie la responsabilité au gouvernement. Longtemps opposé à l’armement de la police municipale, il a, l’année dernière, équipé ses fonctionnaires d’armes non létales, type flash-ball et pistolet à impulsion électrique.
De son côté, Patrick Mennucci propose d’augmenter le nombre de policiers municipaux mais insiste sur la “prévention” et des mesures “d’ordre social”. La réponse à l’insécurité, selon lui : “Diviser par deux le nombre d’habitants vivant en dessous du seuil de pauvreté.”
{"type":"Banniere-Basse"}