Deux albums solo confirment que les musiciens ordinaires de Belle And Sebastian ne touchent au génie qu’en jouant ensemble. Sur la pochette, le label s’est senti obligé de le préciser: ces deux disques sont joués par des musiciens « from Belle And Sebastian ». Pour un single américain de Looper, le label Sub Pop avait […]
Deux albums solo confirment que les musiciens ordinaires de Belle And Sebastian ne touchent au génie qu’en jouant ensemble.
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Sur la pochette, le label s’est senti obligé de le préciser: ces deux disques sont joués par des musiciens « from Belle And Sebastian ». Pour un single américain de Looper, le label Sub Pop avait même poussé le vice jusqu’à préciser : « Stuart from Belle And Sebastian » , sans préciser qu’il s’agissait du bassiste Stuart David et non du seul génie du groupe, Stuart Murdoch, l’inventeur et architecte de Belle And Sebastian. On vend aussi des pâtés comme ça : « contient des morceaux de foie gras » histoire de fourguer de la mousse de foie. Une précision de pochette qui a ici valeur de confession, d’aveu d’impuissance : à coup sûr, ces disques ne peuvent intéresser que les fans de Belle And Sebastian – les inconditionnels même. Chez les Gentle Waves (ce nom de maternelle, quand même…), c’est le côté le plus agaçant, le plus puéril du groupe qui est à l’oeuvre. Partant d’un postulât simplet-puisque l’on compare Belle And Sebastian au Velvet Underground, alors la jolie Isobel Campbell en serait la Nico-, l’Ecossaise s’aventure en solo avec un groupe fantoche principalement recruté dans la paroisse où ces Ecossais ont installé leur maison mère.
Malheureusement, le nostalgique et fragile The Green fields of Foreverland n’est pas l’intouchable Chelsea girl de Nico : tendre jusqu’au niaiseux, naïf jusqu’au nunuche, il rappelle l’exaltation des chants de louveteaux le soir au coin des feux de camp. Car il y a, dans ces chansons ardentes et acoustiques, chantées la main sur le cœur et la braguette cadenassée, un côté Petits Chanteurs à la Croix de Bois, un agaçant arrière-goût de soeur Sourire – tout cela sent un peu trop le voyage en autobus entre leur église de Glasgow et les méga-raves guitare sèche des Journées mondiales de la jeunesse. Bref, ça sent un peu le touche-pipi et le cucul-bénit. Isobel Campbell, gracieuse et nécessaire au puzzle Belle And Sebastian, se rêve ici entre BB et Françoise Hardy : pas étonnant que ses folk-songs pudibondes ou sa country Barbie soient aussi bébés que peu hardies. Un nivellement par le bac à sable (on a la politesse de ne pas évoquer les paroles) auquel échappent Emmanuelle, skatingon thin ice et surtout le magnifique To salt as car, chant de cowboy crépusculaire et envoûtant….
C’est sans doute parce que son titre est emprunté à Italo Calvino que l’on a pris en affection le premier album de Looper, Up a tree. Un disque de pas grand-chose, pourtant, écrit au fusain de violoncelle, aux aquarelles de guitares, aux lavis de synthés, aux ruines des boîtes à rythmes : de lalo-fi délavée mais radieuse, du petit funk plus pauvre que radin. Ainsi, quand Looper s’aventure sur le dance-floor, ses loques font sans doute ricaner les clubbers et leurs uniformes réglementaires de samples et beat boxes :n’empêche que, sous sa misère, Buming flies possède plus de souplesse et de groove que beaucoup d’électroniciens en blouse blanche. Peu de génie mais quelques charmants bricolages où Arab Strap découvre le Prozac (Festival 95) où Suicide rencontre Fatboy Slim (Ballad of Ray Suzuki),ou le Velvet joue éternellement Sunday morning (Quiet & small),où est enfin rendu hommage à la Peugeot 403 de Columbo…
Deux disques qui confirment ce que l’on soupçonnait de Belle And Sebastian : un groupe ordinaire qui a la chance d’être porté par des chansons régulièrement inouïes. Celles de Stuart Murdoch, dont il ne faudra plus attendre très longtemps le premier album solo : on réédite en effet prochainement Tigermilk, le coup d’essai confidentiel de Belle And Sebastian, à l’époque où son groupe marchait à la baguette de ses chansons supérieures, ignorant les poussées d’ego. Il faudrait lancer une pétition pour que cette démocratie redevienne une dictature.
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