Les ados du Royaume-Uni bientôt empêchés de traîner dans la rue avec leurs amis ? C’est l’une des mesures prévues par un projet de loi anglais destiné à lutter contre les « comportements antisociaux ». Une haute-fonctionnaire de la police prie les parlementaires de ne pas perdre leur sang-froid et de ne pas « criminaliser la jeunesse ».
Le projet de loi britannique sur le « comportement antisocial, le crime et le maintien de l’ordre » inquiète les défenseurs des libertés publiques. Actuellement examiné par le Parlement anglais, il devrait être effectif à Noël au Royaume-Uni. Si elle est ratifiée, la loi orchestrée par la secrétaire d’Etat à l’Intérieur Theresa May donnera de nouveaux pouvoirs aux autorités municipales – l’objectif étant de lutter plus efficacement contre les troubles à l’ordre public. La police pourra ainsi appréhender plus facilement les gens ivres dans les rues ou encore les mendiants agressifs.
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Comme le rapporte le quotidien The Independant, des associations de défense des libertés civiles s’inquiètent des potentiels effets pervers de ces nouveaux pouvoirs concédés aux autorités. Elles craignent notamment que des manifestants pacifiques ou encore des groupes d’adolescents puissent eux-aussi être considérés comme des fauteurs de troubles. La directrice de la police du comté de Cleveland, Jacqui Cheer, a fait part de ses réserves à la commission parlementaire sur les enfants. Dans des propos rapportés par le Guardian, elle appelle les parlementaires à ne pas « criminaliser la jeunesse » et dénonce une société de moins en moins tolérante envers les ados, prête à assimiler comme « antisociaux » des comportements qui étaient jusqu’à récemment considérés comme « une part normale de l’adolescence ». Elle invite la police et les citoyens anglais à ne pas faire d’amalgames :
« Avoir un comportement antisocial, ce n’est pas juste être pénible, juste traîner dans la rue avec trois ou quatre personnes. Quand les ados se réunissent, ça peut devenir un peu bruyant, mais est-ce-que c’est antisocial pour autant ? Quand vous marchez dans la rue, que vous riez, que vous plaisantez, est-ce-que c’est antisocial ? »
De moins ne moins d’endroits publics où se réunir
Selon Jacqui Cheer, si les jeunes se regroupent dans les rues, c’est qu’ils n’ont plus d’autres endroits pour se retrouver entre eux. « Nous avons fermé beaucoup d’endroits publics, comme les enceintes des écoles. Où les jeunes peuvent-ils se réunir ? » Devant les parlementaires britanniques, elle a ajouté : « Si nous ne procurons pas aux jeunes des endroits pour se réunir et pousser un peu les limites dans un environnement sûr, c’est nous qui sommes responsables ». La haute-responsable a précisé que son commissariat recevait de nombreux appels concernant la présence de jeunes dans les rues. Les policiers, obligés d’intervenir pour ne pas risquer une plainte, parlent aux jeunes, leur demandent de faire moins de bruit ou de partir, a-t-elle indiqué, ajoutant que ces échanges pouvaient être incompris et vexer les jeunes lorsqu’ils ne font rien de mal.
« Il y a des comportements de harcèlement que nous ne devons pas tolérer, ceux qui font peur aux gens, ceux qui empêchent d’autres jeunes de sortir parce qu’ils craignent d’aller dans telle rue ou dans telle parc. C’est notre boulot : nous sommes là pour protéger tout le monde. Mais nous devons prendre garde à ne pas aller trop loin. »
Le plaidoyer pour la jeunesse de la policière a été salué par la présidente de l’association caritative National Children Bureau, Hilary Emery, qui estime que le projet de loi sur le « comportement antisocial » pourrait avoir des conséquences perverses et dangereuses. « Cette loi empêchera les jeunes de faire ce que font tous les enfants lorsqu’ils grandissent – jouer dans la rue, taper dans un ballon de foot, traîner avec leurs amis. Cela risque de creuser le fossé entre les générations, de nous aliéner la jeunesse et d’empêcher les policiers de combattre les vrais crimes », a-t-elle affirmé.
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