Ce deuxième album de Jorge Mario da Silva, dit Seu Jorge, aura été précédé d’une rumeur très flatteuse : nous n’avions pas encore entendu une seule note de Cru qu’on nous présentait déjà son auteur comme l’égal d’un Jorge Ben ou d’un Caetano Veloso. Vérification faite, “m sieur Jorge” ne manque pas d’allure, mais on […]
Ce deuxième album de Jorge Mario da Silva, dit Seu Jorge, aura été précédé d’une rumeur très flatteuse : nous n’avions pas encore entendu une seule note de Cru qu’on nous présentait déjà son auteur comme l’égal d’un Jorge Ben ou d’un Caetano Veloso. Vérification faite, « m sieur Jorge » ne manque pas d’allure, mais on attendra un peu avant de lui tailler un costume de patron, manifestement trop large pour ses épaules. D’une part, parce que cet autodidacte, issu du ventre affamé des favelas de Rio, doit encore faire ses preuves comme compositeur ? trois chansons seulement portent ici sa signature. D’autre part, parce que Cru n’est pas tout à fait le chef d’œuvre annoncé : simplement un album de très bonne facture, qui indique une fois de plus l’insolente vitalité du vivier brésilien.
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La forte personnalité de Jorge s’exprime à travers la pleine confiance qu’il accorde à la musique, son refus culotté de tout oripeau moderniste, de tout artifice de production. Avec lui, les mélodies circulaires de la samba, réduites à leur plus vive expression, tutoient la beauté radicale du blues. Acteur réputé (on l’a vu dans La Cité de Dieu), Jorge fait preuve d’une sobriété pareillement efficace dans l’interprétation, en particulier dans les chansons les plus nues ? voir la bossa Fiore de la città, composée par l’excellent guitariste Robertinho Brant, l’enflammé São Gonça, ou encore ces vertigineuses plages en pente douce que sont Bola de meia et Una mujer. Un dérapage mis à part (la reprise hors sujet du Chatterton de Gainsbourg), Cru est une rampe de lancement idéale pour ce chanteur habité, dont on devrait entendre parler dans les années à venir.
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