Hourra, Baxter Dury revient : première interview du Londonien et réponses à son image, brillantes et drôles.
Il y a quelques semaines était révélé le très bien nommé Pleasure, premier extrait du tout aussi bien nommé It’s a Pleasure, quatrième album du gouailleur, drôle et grand songwriter du glam tordu que constitue Baxter Dury.
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Le Londonien avait, en 2011 avec Happy Soup, enfin reçu l’amour massif qu’il méritait dès ses débuts discographiques en 2002 : les écoutes répétées et toujours plus épatées d’It’s a Pleasure, à paraître le 20 octobre, nous font parier nos fortunes que les cœurs battront, pour lui, plus fort encore.
Génial entertainer, le bonhomme retrouvera également la scène ces prochains mois : après un passage par la Route du Rock malouine le 16 août, le brillant Londonien tournera dans le cadre du Festival les inRocKs Philips, passant par Tourcoing le 14 novembre, la Cigale parisienne le lendemain, Nantes le 16, Bordeaux le 17 et Toulouse le 18.
En attendant, il nous a accordé une courte interview : courte, certes, mais plutôt très drôle.
ENTRETIEN
Ton précédent album, Happy Soup, a été ton premier album à connaître un véritable succès : quel effet cela a eu sur ta vie ou ta créativité ?
Je ne suis pas certain que ça ait eu un véritable effet sur ma vie. Mais faire un peu plus impression est une manière de sécuriser un peu ses propres fondations : faire de la musique est un métier très précaire, ce n’est pas un boulot très clair, très sûr, basé sur des variables concrètes. Avoir un minimum de succès commercial permet simplement de continuer, notamment de se financer, de payer le studio, ou d’amener ton pantalon en cuir au pressing. (rires) Mes albums avaient été bien reçus dans la presse, des gens me disent les adorer, c’est super, les récompenses artistiques sont formidables. Mais si je pouvais gagner un peu plus d’argent, ça m’irait aussi. J’aimerais posséder un hélicoptère. Je vois d’autres musiciens posséder un hélicoptère. Ce n’est pas mon cas, j’en suis un peu inquiet. (rires)
Tu t’es senti plus en confiance, en abordant It’s a Pleasure ?
Je pense qu’il faut de toute façon laisser vivre la partie délirante, mégalo de sa personnalité. Si tu penses trop à ce que tu es en train de faire, tu peux vite te rendre compte que ça ne rime à rien. Si je m’imagine, homme de 42 ans, sortant ma guitare acoustique pour jouer des morceaux à mes potes, qui ont tous un boulot normal, je me retrouve tout de suite en face des responsabilités normales d’un monsieur mature. Voilà pourquoi il est bon d’avoir un nouveau contrat avec un label : ça me permet de poursuivre mes rêves mégalomaniaques. (rires)
Et ton succès en France : comment expliques-tu que tu aies reçu, d’un coup, tant d’amour ici ?
Je n’ai jamais été capable de l’expliquer. C’est une anomalie. Je pense qu’il y a une sorte de connexion génétique historique. Mon nom, Dury, a un lien avec l’Histoire de France d’il y a plusieurs millénaires, et cela crée sans doute un lien biologique fort avec les Français qui écoutent mes chansons, ils doivent le sentir, inconsciemment, au cœur de leurs cellules. C’est la seule explication, scientifique, que je puisse donner. (rires)
Entre la fin des tournées de Happy Soup et le début de l’écriture de It’s a Pleasure, que s’est-il passé dans ta vie personnelle qui puisse avoir eu une influence sur le disque ?
Rien de particulier : je crois que j’ai de toute façon, depuis le début, un stock suffisant d’anecdotes dans lequel puiser. Mais en continuant à écrire, on apprend à décrire les choses d’une manière différente, à trouver de nouvelles façons d’être excité à l’idée de raconter une histoire. Ensuite, tout vient du même endroit, c’est la même matière : c’est très égocentrique, je ne parle jamais vraiment d’autre chose que de moi-même. (rires) De mon inadéquation en tant qu’homme, ou de celle que je peux observer chez les autres : l’occupation quotidienne que constitue l’inadéquation est ce qui m’intéresse le plus.
Comment décrirais-tu cette « inadéquation » dont tu parles ?
Les paroles de chansons sont un format suffisamment ésotérique pour ne pas avoir, justement, à trop bien définir les choses. C’est la grande différence entre écrire une chanson et écrire un livre : dans une chanson, on n’a pas à tout rationaliser, c’est beaucoup plus facile. On peut même raconter pas mal de conneries en faisant sonner ça plutôt bien.
Musicalement parlant, tu as parlé de « musique squelettique berlinoise » à propos de It’s a Pleasure. Qu’entendais-tu par là ? Qu’avais-tu en tête quand tu as commencé à l’écrire ?
Je ne sais pas, quelque chose d’un peu post-Kraftwerk, d’un peu austère, dénudé, il y a un peu de cela sur l’album. Il y a un peu de brillance, un peu d’amertume aussi. Mais je n’ai généralement pas d’envie très dessinée quand je commence à écrire, je ne suis pas ce genre de musicien. Je sors des choses qui m’intéressent sur le moment et j’espère que, six mois plus tard, elles continueront à m’intéresser : si c’est le cas, je suis content, cela signifie que ces chansons se sont qualifiées. Le processus est généralement plutôt chaotique. J’ai passé deux ans sur cet album, ça a été assez long. Beaucoup d’édition : j’écris une chanson, je la jette, puis je la reprends et la change, et la préfère ainsi, mais finalement non, je reviens à la première version, qui finalement ne me convient pas… Ca peut être assez douloureux. Ca l’a été un peu : j’ai tendance à croire que ça doit l’être un peu, ça vient peut-être de ma génération, mais je ne peux pas m’empêcher de penser que ce n’est pas bon si ça ne l’est pas. Je ne fais rien facilement. J’ai besoin d’un peu drame ! (rires)
Que penses-tu de cet album ?
J’en suis assez fier, je pense y avoir mis toute l’intelligence musicale dont je dispose. Mais je n’aime pas trop réfléchir à ces choses, et mes opinions peuvent varier, les mauvais jours notamment.
Que peux-tu me dire de te voix, de ton chant, et des voix féminines sur l’album ?
Je ne saurais dire comment ma voix a évolué : j’imagine qu’on apprend quelques petits trucs avec le temps, et qu’on fait avec, naturellement. Je ne vais pas soudainement me dire « Bon, je vais désormais chanter dans une autre gamme, en si mineur, ça sonnera beaucoup mieux ainsi », la manière dont je fais les choses vient souvent par accident. Comme je dis souvent, tout vient de la chance, et il faut espérer que ça fonctionne : c’est un processus assez cru dans lequel la pensée n’intervient qu’assez peu. Les voix féminines ont été chantées par une française, Fabienne Debarre, de We Were Evergreen. Elle est excellente.
Que peux-tu me dire de ce titre, « It’s a Pleasure » ?
J’ai toujours du mal avec les titres d’album, je suis un peu fainéant. Donc je finis invariablement par choisir le titre d’une des chansons… J’ai trouvé que le titre collait bien à l’ensemble. Mieux que « Grey Penguin », ou « Ice Tree », ou « Hand With No Leg », enfin mieux que toutes les autres conneries qui peuvent me passer par la tête (rires). Il y a peut-être un peu d’ironie dans ce titre, « It’s a Pleasure ». Il y a sans doute beaucoup de sens cachés, même à moi-même : peut-être faudra-t-il un jour que j’aille m’allonger chez un psychiatre pour retrouver tous les liens cachés entre toutes ces choses.
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