Le western des Carpates d’Adrian Raso, l’éthio-soul d’Ester Rada et la conversation silencieuse de Titi Robin et Michael Lonsdale, c’est le tour du monde musical proposé par Louis-Julien Nicolaou.
CongopunQ, transe et non-sens
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De quoi CongopunQ est-il le nom ? Jusqu’à ce jour, les principaux intéressés se sont bien gardés d’apporter la moindre réponse à cette interrogation. Le journaliste, lui, se risquera à avancer que CongopunQ est l’immersion du batteur Cyril Atef (moitié de Bumcello) et du performer Dr Kong dans une jungle insensée d’objets dépareillés, de malles éventrées, de squelettes peinturlurés, d’horloges étêtées, étoffes, fourrures et poudres alchimiques, le tout déversé au son d’une pop synthétique secouée de rythmes africains et de transe vaudou. No guns more drums est fidèle à cet esprit de carnaval punk absurde et décontracté que cultivent les deux acolytes, tout sauf des branleurs par ailleurs, dès qu’il s’agit de pousser les corps à la danse. On a hâte de voir comment ils démonteront le Casino de Paris, le 23 avril prochain.
Ester Rada, diva de l’éthio-soul
Ester Rada est ce que l’on appelle une “Beta Israel”, une Ethiopienne pratiquant la religion juive. Etablie en Israel depuis plusieurs années, elle a d’abord mené une carrière d’actrice avant de publier son premier EP, en novembre 2012. On y découvrait une chanteuse oscillant entre soul, pop et ethio-jazz. Enfin disponible, Ester Rada poursuit dans cette voie. Propulsée par des cuivres imposants, la diva longiligne a ajouté une dose de reggae et d’afrobeat au brassage original tout en prenant soin de ne jamais ternir le vernis éthiopien destiné à la distinguer de la cohorte des chanteuses de soul actuelles. S’il y avait une justice, Ester Rada devrait bientôt être célébrée comme une de leurs reines et ainsi amener le public européen à s’intéresser de plus près à la passionnante scène israélienne. En attendant ce beau jour, on ira succomber au charme vocal de la belle le 15 mars, à l’Embarcadère d’Aubervilliers, dans le cadre du 31ème festival Banlieues Bleues.
Les élixirs diaboliques d’Adrian Raso & Fanfare Ciocărlia
Sous le titre A Devil’s Tale, l’époque moderne s’attend plus à entendre un blues de Robert Johnson qu’à se retrouver dans l’un de ces récits pleins d’élixirs diaboliques, de femmes fatales et de créatures équivoques que E.T.A. Hoffmann légua au XIXe siècle romantique. La rencontre entre le guitariste canadien Adrian Raso, adepte du jazz manouche, et de la Fanfare Ciocărlia, habituée à jouer les mélodies des Balkans à toute allure, est placée sous le signe de cette double influence. A partir de thèmes égrenés par un banjo de bastringue ou une guitare électrique fantomatique, Raso et sa bande édifient un western des Carpates où les instants de grâce innocente alternent avec un grotesque débridé. Dans cette étrange série B dominée par les ombres de Faust et Dracula en carton, une guitare gitane caracole, toujours talonnée par des cuivres bouffes, et le sourire du Malin disparaît dans l’éclat de rire du corps exultant.
Titi Robin et Michael Lonsdale, la conversation silencieuse
A force de l’entendre promener librement ses cordes (de luths orientaux et de guitare) autour de la Méditerranée ou sur la route de la Soie, et de le voir multiplier les collaborations (notamment avec Erik Marchand, Gulabi Sapera et Faiz Ali Faiz), on se doutait bien que Titi Robin était quelque peu poète. On ignorait cependant que cette poésie, il ne la transcrivait pas seulement en musique, mais aussi en mots. Pour L’Ombre d’une source, le musicien a confié ses propres textes à Michael Lonsdale, comédien d’exception dont la présence et la voix si particulières ont marqué le théâtre et irradié des réalisations de Buñuel, Losey, Sautet ou Truffaut. Dans l’intimité du murmure et des notes subtilement déliées comme les grains d’un chapelet lors d’une méditation, les deux hommes épris de mysticisme ont établi une conversation hors du temps, pleine de sourires entendus et de recueillements muets, à mille lieues des rutilances factices de l’époque contemporaine.
L’énergie consolatrice de Dobet Gnahoré
Reflétant l’engagement musical et humain de Dobet Gnahoré, Na Drê diffuse un folk fraternel qui mêle des influences africaines et européennes et se met au service de la danse sans oublier de soutenir des messages dénonçant certains aspects de la position accordée aux femmes par les sociétés traditionnelles. Sur ce quatrième album, la chanteuse ivoirienne aux muscles saillants, au visage couvert de peintures de guerre et aux coiffures extravagantes, se montre moins puissante, plus caressante qu’à l’accoutumée, comme s’il lui semblait désormais nécessaire de sublimer les maux de l’Afrique et ses propres tourments dans une énergie consolatrice, une dépense libératrice. On regrettera seulement que sa voix aux graves si séduisants se fonde désormais trop souvent dans des choeurs et des arrangements assez convenus. Mais c’est sur scène qu’il faudra juger son nouveau répertoire, car c’est là que Dobet donne habituellement le meilleur d’elle-même. Aux côtés de Kareyce Fotso et Habib Koité, elle est justement à l’affiche d’une belle soirée, le 16 mars, au Cabaret Sauvage.
http://www.youtube.com/watch?v=fIfVdkO2IMA
Habib Koité à la source malinké
Après avoir beaucoup tourné en compagnie du bluesman Eric Bibb pour promouvoir leur Brothers in Bamako paru en 2012, Habib Koité est revenu dans son Mali natal afin de recueillir l’inspiration de Soô à l’intarissable source malinké. Renonçant à la batterie au profit de la calebasse, privilégiant l’acoustique à l’électricité et aux trucages en studio, Habib ne s’est laissé guider que par son intuition et sa volonté d’être, comme toujours, le plus honnête possible. S’il chante en bambara, mais aussi en dogon, en malinké et en khasssonké, c’est que l’unité n’est pas mot vain pour lui, et qu’il ne saurait envisager de traduire ce concept autrement que dans le langage universel par excellence : la musique. Habib Koité est ainsi, un homme profondément pacifique et un musicien d’abord et avant tout. S’il traite par instants de questions douloureuses telles que la circoncision et les mariages arrangés, avec lui, la douceur et l’espoir l’emportent toujours.
http://www.youtube.com/watch?v=5HeumneSaeI
Driscoll & Kouyaté, les yeux dans les yeux
Le chanteur et guitariste américain Joe Driscoll et le joueur de kora guinéen Sekou Kouyaté se sont rencontrés à l’occasion du festival Nuit Métis de Marseille. L’entente et la complicité ont été immédiates et, au bout d’une semaine à explorer les rythmes et mélodies de leurs continents respectifs, le duo a décidé de prolonger l’expérience au-delà du festival en enregistrant sur place un album. Faya doit son efficacité à l’approche brute, très spontanée, des deux hommes. Le folk-rock mêlé de ragga et de hip hop brut de décoffrage de Driscoll y soutient les élégants galops de la kora électrifiée de Kouyaté, l’échange et la balance rythmique étant les seuls arbitres tolérés par des musiciens pleinement conscients que c’est en regardant l’autre dans les yeux, en laissant ses mains imiter ses mouvements et ses pieds battre le même tempo, que l’on tire le meilleur de soi.
Maurice el Medioni, l’Oranais
Maurice el Medioni est un homme unique. Ayant passé sa jeunesse à Oran, où il a accompagné entre autres très grands noms de la musique judéo-algérienne Reinette l’Oranaise et Lili Boniche, il est aujourd’hui l’un des derniers dépositaires directs d’un art dont les racines sont deux fois millénaires mais que la tragédie de la Guerre d’Algérie a brutalement menacé de disparition. Cette musique, il a su l’adapter à un instrument sans quarts de ton ni possibilités de reproduire les mélismes caractéristiques du chant oriental, le piano. Pour cela, il a développé une technique et un swing très singuliers, d’une séduction immédiate, et qui doivent beaucoup à son écoute attentive du jazz et de la musique latine. Enregistré lors d’un concert au musée d’Art et d’Histoire du judaïsme, Oran-Oran est un magnifique témoignage de cet art si profond, porté par la bonhommie très touchante d’un grand monsieur aujourd’hui âgé, mais toujours aussi généreux avec son public.
Youri Defrance, shaman’s blues
Egalement connu sous le nom de Youri Blow, Youri Defrance a la passion du blues du Mississippi, qu’il perçoit comme l’expression d’une transcendance naturelle. Epris de shamanisme, il a souvent quitté les rivages de Bretagne pour s’imprégner de magies péruviennes et mongoles. De ses initiations, il est revenu avec un bric-à-brac de guitares, flûtes, violons et vièles mongoles dont il joue avec une certaine rudesse, plus intéressé par le corps-à-corps avec l’instrument que par la maîtrise parfaite de ses techniques. La spontanéité, voire l’inachèvement volontaire, caractérisent les 7 titres (plus un fantôme) de The Turning Point, suite d’invocations animistes solitaires et chaotiques, parfois brouillonnes, à d’autres instants inspirées. A découvrir le 14 mars, sur la scène du Théâtre 13, dans le cadre du festival Blues au 13.
https://www.youtube.com/watch?v=SnCnbfG5AIQ#t=23
Trois festivals pour le mois de mars
Pour sa 18e édition, le Festival de l’Imaginaire a souhaité mettre à l’honneur les femmes à travers une programmation variée qui, comme toujours avec ce précieux événement, permettra de découvrir des traditions séculaires d’autant plus importantes qu’elles sont pour la plupart aujourd’hui menacées d’extinction. Pour le seul mois de mars, on pourra ainsi s’émerveiller, à la Maison des Cultures du Monde, du répertoire populaire coréen Arirang (les 7 et 8 mars), du chant berbère de Cheikha Hadda Ouakki (les 14 et 15), du Ca Trù du Golfe du Tonkin (les 20 et 23) et du Don Ca Tai Tu du Delta du Mékong (les 21 et 22). A l’Institut du Monde Arabe, le festival programme également les Chantres coptes d’Egypte (les 28 et 29).
A Rezé (commune touchant Nantes), un autre festival, Les Instants du Monde promet une belle affiche pour la seconde moitié du mois de mars : la chanteuse serbe Svetlana Spajic le 18, Forabandit le 19, Kwal et les Touaregs de Terakaft le 20, la chanteuse originaire du désert algérien Aïcha Lebgaâ et la sublime chanteuse et joueuse de oud palestinienne Kamilya Jubran le 21, les musiciens kurdes de Nishtiman et les occitans de Du Bartás le 22.
A noter encore que, pour sa 31ème édition, le festival Banlieues Bleues fait la part belle aux musiques du monde en invitant d’excellents artistes à se produire. Qu’on en juge : Ester Rada et Seun Kuti (le 15 mars à Aubervilliers), Yom (le 19 à Tremblay-en-France), Bassekou Kouyaté (immanquable, le 22 à Stains), les Brésiliens de Metá Metá et Siba (le 28 à la Courneuve), l’immense Salif Keita (le 28 à Villepinte) et la cap-verdienne Neuza (le 29 à Pierrefitte-sur-Seine). Rien que pour le mois de mars, on aura donc largement de quoi se réjouir en banlieue parisienne.
Enfin, impossible de clore ce 30ème Monde des musiques du monde sans rendre un ultime hommage à Paco de Lucía. Enregistrée en 1987 pour l’album Siroco, La Barrosa
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était l’une des compositions fétiches du maestro, qui l’a très souvent interprétée sur scène. Elle témoigne à merveille de son art, à jamais inégalable.
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