Dans Summer, Monica Sabolo ausculte les maux, vices et dérèglements d’une famille huppée, esquissant les contours d’une féminité moderne et fragile.
Monica Sabolo a le goût des “filles qui ont des rêves trop grands pour elles, ou qui font naître une douleur, quelque chose qui ressemble à du ressentiment, dans le cœur des garçons, et qui finissent dans le coffre d’un 4×4, au fin fond d’une forêt.”
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Ces filles aux allures de prom queens, aux jambes élastiques et aux destins tragiques, l’auteure en avait déjà fait les victimes ensorcelantes de Crans Montana, son précédent – et meilleur – roman. Aujourd’hui, dans cette cinquième fiction, un thriller aquatique et sibyllin, c’est encore autour d’une nymphette à la beauté hypnotique que s’articule le drame : Summer Wassner, 19 ans, queue de cheval, minishort et walkman.
Ici pas de 4×4 ni de forêt mais un lac, le Léman, “au gris sombre, presque métallique.”. Impassible et inquiétant. C’est lors d’un pique-nique chic sur la rive suisse, donné par les dispendieux Wassner pour célébrer l’été, que la jeune héritière disparaît. Dans son sillage, elle laisse les volutes de fumée de ses cigarettes italiennes, des rumeurs outrageantes et Benjamin, un petit frère mélancolique et instable. Hanté par les images fantomatiques de sa sœur évaporée, c’est ce cadet au passif psy qui va rouvrir une enquête que toutes les forces en présence – famille, amis, police – semblent s’être accordées à bâcler vingt-cinq ans plus tôt.
La liberté dans la douleur
Tandis que dans les rêves du frangin sous cachets, c’est la silhouette de Summer qui remonte des profondeurs pour troubler la surface du lac, le récit de Monica Sabolo, lui, exhume les maux, vices et dérèglements qui refluent sous le vernis luxueux du ménage huppé. L’auteure s’engouffre et fouille ce foyer asphyxié par les convenances bourgeoises et la dictature des apparences. A la littérature alors d’exposer les drames obscènes et les secrets de familles : derrière les portes closes, il y a les rivalités, les déséquilibres affectifs et la vulnérabilité des enfants face aux démons des parents.
Mais il y a surtout dans ce Summer, comme dans les précédents romans de Sabolo, l’esquisse d’une féminité singulière, moderne et fragile, prisonnière des fantasmes qu’elle suscite mais avide d’une liberté qui se conquiert dans la douleur.
Summer (JC Lattès), 320 pages, 19 €
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