Derrière Slicker se cache John Hughes, 27 ans, physique de postado satanique, posant ici avec quelques amis au milieu d’un bestiaire de taxidermiste. Son père, John lui aussi, est le réalisateur de teenage-movies d’avant le déluge du genre (The Breakfast Club, 1985), mais on s’en fout. Le fiston dirige le label de Chicago Hefty, dont […]
Derrière Slicker se cache John Hughes, 27 ans, physique de postado satanique, posant ici avec quelques amis au milieu d’un bestiaire de taxidermiste. Son père, John lui aussi, est le réalisateur de teenage-movies d’avant le déluge du genre (The Breakfast Club, 1985), mais on s’en fout. Le fiston dirige le label de Chicago Hefty, dont Slicker est la principale attraction mais où émargent aussi Telefon Tel Aviv ou Savath & Savalas, au croisement du groove organique, de l’electro tactile et du post-rock cérébral.
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Cet impressionnant troisième album de Slicker pourrait presque servir de vitrine au label tant il ouvre la voie, tel un aiguillage en folie, à mille directions possibles. Sur Hefty, Hugues a notamment ressorti les époustouflants albums seventies du tromboniste Phil Ranelin pour le label Tribe, que Ranelin avait fondé avec le saxophoniste-flûtiste Wendell Harrison. Ranelin et Harrison figurent ici dans le carré VIP des invités de We All Have a Plan, instillant des traînées de jazz cosmique et onirique à l’intérieur d’un cadre hip-hop totalement dilaté et démantibulé.
Comme les émérites rappeurs Elzhi (Slum Village) et Phat Kat figurent également dans le cockpit, il est simple d’imaginer à quelle noble essence cet album carbure, même si les surprises ne cessent d’en émailler le parcours. Ainsi Knock Me down Girl, chanté à l’unisson par une féline nommée Lindsay Anderson ? déjà repérée chez Telefon Tel Aviv ? et par Hughes lui même, inaugure un genre de r n’b en chambre, médicamenteux et calfeutré. L’autre climax du disque a pour nom A Strong Donkey, et il s’agit d’une variation autour de l’incendiaire Don’t Call Me Nigger, Whitey de Sly & The Family Stone, sur lequel on entend la voix du Ghanéen Dan Boadi, un autre de ces héros de l’underground seventies à Chicago, ayant en son temps tracé des lignes de connexion entre disco, jazz et afro-beat.
Toute la science de John Hughes tient dans cette infusion de genres et d’esprits, non dans un but passéiste de remise en selle de vieux étalons mais bien comme perspective futuriste. Car We All Have a Plan parvient à saisir l’oreille non seulement par sa pertinence historique ? en mémoire d’une époque ou le jazz était funky et le funk déluré ? mais aussi par son étrangeté propre, où les violons lugubres du post-rock se frayent aussi une place dans la fournaise.
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