C’était un grand échalas au regard un peu fou, une de ces silhouettes dégingandées aux trais creusés qui respirent une force physique débordante, un cow boy taiseux et magnétique qui a imprimé d’une présence discrète sept décennies de cinéma. Né en 1926 dans le Kentucky de parents agriculteurs, cuistot dans la marine durant la Seconde […]
Le vieux cowboy du cinéma américain est mort vendredi 15 septembre à l’âge de 91 ans. Habitué aux seconds rôles marquants, il avait brillé chez Wim Wenders et David Lynch.
C’était un grand échalas au regard un peu fou, une de ces silhouettes dégingandées aux trais creusés qui respirent une force physique débordante, un cow boy taiseux et magnétique qui a imprimé d’une présence discrète sept décennies de cinéma. Né en 1926 dans le Kentucky de parents agriculteurs, cuistot dans la marine durant la Seconde Guerre mondiale, Harry Dean Stanton plaque l’université pour l’école d’art dramatique, avec dans le viseur les plateaux d’une télévision alors en pleine expansion.
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Consécration avec son rôle dans Paris, Texas
Son physique atypique l’écartera longtemps des premiers rôles, mais les personnages secondaires qu’il interprètera par centaines, cheveux en batailles et coolitude à toute épreuve, dessineront une filmographie exigeante et touffue. Tour à tour gangster chez Peckinpah (Pat Garrett et Billy le Kid, 1973), victime précoce de l’Alien de Ridley Scott (1979) ou inspecteur de police aux trousses d’une voiture démoniaque chez Carpenter (Christine, 1983), Harry Dean Stanton aura sillonné Hollywood de son centre à ses marges, de la science-fiction au western.
C’est à l’écrivain et scénariste Sam Shepard, croisé par hasard dans un bar de Santa Fe, qu’il doit son rôle le plus marquant, celui de l’amnésique Travis Handerson, déchirant fantôme du désert au passé houleux immortalisé par la caméra de Wim Wenders dans son Paris, Texas (1984).
Ses collaborations avec David Lynch
Moins flamboyante mais toute aussi fascinante est la longue collaboration que l’acteur a tissée avec David Lynch, faite de connivence artistique et d’amitié sincère. De Sailor et Lula (1990) à Twin Peaks saison 3 (2017), le cinéaste fera appel à lui dans quatre films et une série.
Le beau visage ridé de l’acteur imprimera une dernière fois la pellicule dans Lucky de John Carrol Lynch, doux voyage spirituel d’un vieil athée dans lequel il croisera son compagnon de route David Lynch. C’est évidemment ce dernier qui lui a offert les plus beaux adieux dans la troisième saison de Twin Peaks. Le vieux propriétaire de camping qu’il y interprète à nouveau, vingt ans après le film Fire Walk With Me, y embrasse en un même mouvement la sérénité complète d’une promenade sans but et l’horreur absolue de la mort d’un enfant, le chagrin d’une mère éplorée et la douceur de la brise d’automne, et clôt le jour d’une chanson folk susurrée en vieux cowboy. « We will miss your bright eyes and sweet smile » (« Tes grands yeux et ton sourire attachant nous manqueront »), Harry Dean Stanton a quitté la vallée.
https://youtu.be/ame5L8HJ6i0
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