Alors que la première saison se concentrait sur les histoires de cœur de Piper Chapman, celle-ci s’efface dans la saison 2 au profit des autres personnages, donnant plus d’épaisseur à la « dramédie » de Netflix.
Dire qu’Orange is the new black était très attendue est un euphémisme. Après une première saison acclamée par la critique (l’actrice Taylor Schilling a été nommée pour un Golden Globe en 2014), Netflix a multiplié les campagnes de pub pour promouvoir la saison 2 de sa série, dont elle a mis tous les épisodes en ligne le 6 juin dernier.
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13 épisodes disponibles un vendredi après-midi : tous les éléments étaient réunis pour que les utilisateurs puissent engloutir toute la saison pendant le week-end. Une tendance que l’on appelle le binge-watching, ouvertement critiquée par de nombreux médias, qui vont même jusqu’à sommer leurs lecteurs de ne pas s’y adonner.
C’est pourtant comme cela que l’on a choisi de visionner cette deuxième saison, avec autant d’impatience que d’enthousiasme (et quelques nuits sans sommeil). Une saison riche en événements, qui se caractérise par l’effacement de son personnage principal au profit d’une série définitivement chorale.
Piper se fond dans le décor
Le premier épisode de la saison 2 induit pourtant en erreur : on y retrouve uniquement Piper (Taylor Schilling), ballotée d’une prison à l’autre jusqu’à son arrivée à Chicago où elle doit témoigner au procès d’un baron de la drogue. Elle y rencontre de nouveaux personnages qu’on ne verra que pendant ces cinquante minutes, avant de rejoindre à nouveau les détenues de la prison fictive de Litchfield à New York.
Ce n’est qu’alors que débute la deuxième saison de Orange is the new black. Comme si l’ellipse du premier épisode n’avait servi qu’à conclure l’haletant cliffhanger sur lequel la précédente saison s’était terminée, et lancer une nouvelle narration complètement différente. De retour à Litchfield, Piper n’est plus le personnage complexe, tiraillé, hésitant et fragile que l’on connaissait. Endurcie par la perte de tous ses repères, elle n’est plus notre « porte d’entrée » dans le monde carcéral, comme elle l’était dans la première saison. Elle fait à présent partie du décor, errant entre les scènes sans vraiment prendre part aux autres intrigues qui constituent le socle de cette saison 2.
Son absence est d’ailleurs encore plus marquée lorsque l’on enchaîne les épisodes les uns après les autres. Hormis les quelques scènes romantiques avec son âme sœur Alex Vause (Laura Prepon, qui n’apparaît que pendant 4 épisodes mais reviendra à plein temps dans la saison 3), Piper n’est présente que pour disséminer des remarques hilarantes à droite à gauche, montrant la capacité de Taylor Schilling à exceller dans le comique rien qu’avec des réponses laconiques ou des regards circonspects.
Un tournant plus sombre
La série chorale prend tout son sens avec l’arrivée de Vee, la mère adoptive de Taystee, qui bouleverse l’ordre établi de Litchfield. Renvoyée dans la même prison sur laquelle elle régnait dans les années 1980, Vee découvre que « les noirs ne dirigent plus les choses ». Bien décidée à reprendre le pouvoir, la quinquagénaire pose ses pions, lentement mais sûrement, pour organiser un véritable putsch qui transforme peu à peu la prison à « sécurité minimale » paisible que l’on connaissait en dangereux pénitencier où dominent trafic et violence.
Orange is the new black prend ainsi un tournant plus sombre tout en multipliant les éléments de « comic relief », ces répliques savoureuses qui soulagent la tension dramatique, toujours soulignées par une musique sautillante indispensable aux changements de rythme. Un procédé qui semblerait un brin grossier si les dialogues n’étaient pas si bien écrits et finement délivrés.
Le mot « dramédie » n’a jamais pris autant de sens qu’avec la série de Netflix, qui oscille tellement entre sérieux et dérision qu’elle a été classée en tant que drame lors des Golden Globes de janvier 2014 mais qu’elle concourra parmi les comédies pour les Emmy Awards de septembre prochain.
Une ambivalence qui provoque des frissons lorsque l’on découvre que Morello a inventé de toutes pièces son fiancé, des rires quand le « gang des vieilles détenues » s’associe pour mater les plus jeunes ou encore de la colère devant le changement de comportement de l’enjouée Taystee qui retombe peu à peu dans les bras de sa mère adoptive manipulatrice.
Une prison difficile à quitter
Binge-watcher Orange is the new black revient à plonger tête baissée dans un environnement clos parfaitement addictif. Les scènes en extérieur sont réservées aux flashbacks tandis que le présent se déroule quasiment uniquement derrière les grillages de la prison. Une prison dont les murs semblent se resserrer à mesure que la maffia de Vee prend le pouvoir et impose une « loi du plus fort » à laquelle les détenues de Litchfield n’étaient plus habituées. Chaque épisode est dédié à l’une d’entre elles, forcées tour à tour de choisir leur camp (tenir tête au tyran ou s’écraser).
A mesure que l’on avance dans la série, les pièces deviennent aussi familières que le salon d’une sitcom américaine. La cuisine, les dortoirs, le parloir : ces endroits qui nous étaient présentés comme si terrifiant à travers les yeux de la nouvelle arrivante Piper sont à présent des repères rassurants. Une impression renforcée par le désespoir des quelques prisonnières à qui on annonce leur transfert dans une prison plus agréable, mais loin de leurs marques. La prison de Litchfield est devenue leur maison, que le téléspectateur aussi a du mal à quitter.
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