Onze ans après « Radar Rider », acte de naissance d’Ed Banger, Gilles Bousquet, aka Mr Flash, sort enfin son premier album « Sonic Crusader » sur le label de Pedro Winter. Entretien avec celui qui a longtemps oeuvré dans l’ombre pour le bien de l’electro française.
Déjà onze ans passés chez Ed Banger et ce n’est que ton premier album !
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Mr Flash : Je suis un perfectionniste. J’ai remis le couvert 15 fois pour Sonic Crusader ! Pedro a eu entre ses mains autant de versions avortées. A chaque nouvelle mouture, il me disait : « Allez, on le sort ! », mais je n’étais pas prêt, pas satisfait du résultat. Et puis j’ai fait beaucoup de choses pendant ces onze ans, j’ai eu pas mal de projets annexes (il a notamment produit My God Is Blue de Sébastien Tellier ou The Ecstatic de Mos Def – ndr). Ça m’a pris du temps et de l’énergie, car je m’investis à fond dans ce que je fais.
Tu as baigné très tôt dans un univers de musique et de cinéma.
La musique, c’était un divertissement dans la famille. Mon père jouait du piano pour s’amuser. Il jouait sur des films muets. Il m’a inscrit au conservatoire, où j’ai appris la batterie. La musique a donc toujours été pour moi un divertissement, je ne l’envisage pas autrement. J’aime me prendre la tête quand je travaille sur mes morceaux, mais pour l’auditeur ça doit rester du divertissement. J’aurais pu écrire des bouquins, mais je suis nul. J’ai été machiniste pour le cinéma, mais à l’époque, c’était encore compliqué de faire un film, ça mobilisait tout de suite énormément de monde. La musique a été pour moi un moyen très simple de tout contrôler.
Sonic Crusader est un album très cinématographique justement, qui jongle énormément avec les ambiances.
Cet album, c’est onze ans de ma vie. Il en reflète différents moments, différentes émotions. J’ai besoin de la musique pour projeter ce que je ressens à un moment précis, une satisfaction, un malheur… c’est une nécessité, c’est salvateur. Ça peut être de la mélancolie, une envie de baston… Mais plutôt que d’aller castagner le premier mec venu, je vais la retranscrire dans mes morceaux. Ils sont autant de chapitres et d’histoires qui construisent l’album. Effectivement, c’est un peu comme un scénario de film avec un début, un milieu et une fin. Le scénario de ma vie, en quelque sorte. Peut-être que j’envisage la vie comme un film…
Le résultat est un melting pot étonnant. On passe de l’electro rétro typée 80’s (Venus In Furs) à un rap US carré (Number One). Avec toujours, en toile de fond, ce beat puissant qui te caractérise.
Ça doit venir de ma formation de batteur ! Ce qui est sûr, c’est que j’ai dû me battre comme un chien pour en arriver là, ça n’a jamais été facile. Sonic Crusader, c’est onze ans de baston ! Et le beat puissant, très fort, symbolise ça. Les deux derniers titres, Apocalypso et The Wake, sont plus posés, plus introspectifs. Ils représentent parfaitement ce que je suis aujourd’hui, à 40 ans. On évolue tous dans notre vie, on grandit, on a moins besoin de gueuler pour exister. L’éclectisme de l’album vient de mon envie de faire plein de choses différentes. J’en ai besoin pour me sentir libre. Et pour ça, la musique est un terrain de jeu génial !
Tu as invité quelques beaux noms sur cet album : le rappeur Action Bronson et Surahn (moitié d’Empire of The Sun) notamment.
J’avais envie de réunir des mecs complètement différents sur le disque, avec comme seul mot d’ordre : le partage. Je suis ami avec Surahn depuis quelques années et je suis fier de l’avoir sur l’album. Action Bronson, c’est un Ghostface Killah actuel. Il représente cette idée qu’on se fait du rap old school. J’aime les gens qui ont de la classe et qui proposent quelque chose. Action Bronson, c’est une proposition artistique à lui tout seul : tu ne peux avoir que de l’amour pour un mec qui te parle de salami !
Pour la cover, tu as obtenu la reproduction sur la pochette de Double six, une œuvre de Jean-Pierre Vasarely, dit « Yvaral « .
J’adore l’art ! Je suis quelqu’un de très curieux et j’aime par dessus tout explorer, découvrir. J’ai grandi à Aix-en-Provence où se trouve la Fondation Vasarely. C’est le premier musée d’art contemporain dans lequel ma mère m’a emmené. J’avais 5 ans. Victor Vasarely et son fils Jean-Pierre sont des artistes que je trouve extraordinaires. Cette œuvre d’Yvaral est totalement confidentielle, elle a été oubliée. C’est un ovni dans sa carrière, il en a été tiré 200 exemplaires numérotés. Et elle date de 1972, année de ma naissance ! Pour moi, ça fait sens. Avoir Double six sur la pochette, c’était une manière d’illustrer un peu plus qui je suis, d’où je viens. C’était le complément idéal au disque en lui-même.
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