Le parti du Premier ministre israélien a obtenu mardi une courte majorité aux législatives. Les bons résultats du centre gauche devraient l’obliger à revoir la formation de son gouvernement.
C’est une victoire aux allures de défaite. Certain d’être reconduit à son poste de Premier ministre, Benyamin Netanyahou est pourtant dans la tourmente. Alors qu’il s’attendait à un véritable plébiscite dans les urnes, la liste commune de son parti, le Likoud, et d’Israel Baitenou, le parti de droite nationaliste d’Avigdor Liberman, n’a réussi à obtenir que 31 sièges sur les 120 que compte la Knesset, le parlement israélien. Lors des législatives de 2009, ils en avaient recueillis 42.
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Pourtant, Benyamin Netanyahou a tenté jusqu’au bout de fédérer ses troupes. Au cours de la journée, il n’a pas cessé d’envoyer des messages à ses électeurs via les réseaux sociaux. « Je vous appelle à tout laisser tomber et à aller voter Likoud sur-le-champ », a-t-il écrit dans l’urgence sur sa page Facebook. Ses appels sont restés sans effet et l’élection d’hier sonne comme un signal d’alarme pour une coalition de droite de plus en plus inaudible pour l’opinion publique israélienne.
« J’ai toujours voté pour Netanyahou, par tradition et peut être aussi par facilité, explique Lior, étudiante à l’université de Jérusalem. Cette année, j’ai trouvé qu’il avait vraiment mené une mauvaise campagne. En plus, de nouvelles personnalités intéressantes et enthousiastes se sont lancées en politique. J’ai eu envie de donner sa chance à l’une d’entre elles », confie elle.
Et Lior est loin d’être la seule à vouloir renouveler le personnel politique en place et modifier les rapports de force à la Knesset. Ils sont nombreux à avoir voté pour « Yesh Atid » (« Il y a un futur »), un petit parti créé il y a quelques mois à peine par un ancien journaliste, Yaïr Lapid. Ce parti de centre gauche laïc est devenu en une soirée la deuxième force politique au Parlement avec 19 députés. « J’ai voté pour Lapid parce qu’il tient un discours réaliste et social. Évidemment, le conflit avec les Palestiniens et les questions de sécurité nous préoccupent, mais il faut surtout s’intéresser aux conditions de vie des Israéliens, de plus en plus mauvaises. Lapid n’a pas oublié les leçons de ‘l’été des indignés’, en 2011″, détaille Michal, elle aussi étudiante à Jérusalem.
Une mauvaise surprise pour Tzipi Livni
« Yesh Atid » se place devant le parti travailliste, lui aussi emmené par une ancienne journaliste, Shelly Yachimovich, qui recueille 17 places. Juste derrière, le parti de droite nationaliste et religieuse « Maison juive » (« HaBayit Hayehudi ») dirigé par Naftali Bennett obtient 12 sièges. Les partis ultra-orthodoxes sépharade « Shass » et ashkénaze « Judaïsme unifié de la Torah » recueillent respectivement 11 et 6 sièges. L’élection d’hier est une mauvaise surprise pour l’ancienne ministre et chef de file de « Kadima », Tzipi Livni. Son parti centriste, « HaTnouah » (« Le Mouvement »), lui aussi créé en vue des élections, n’obtient que 7 places de députés.
Au total, l’alliance des partis de droite « Likoud-Israël Baitenou », « Maison juive », « Shass » et « Judaïsme unifié de la Torah » ne peut se prévaloir que d’une très courte majorité face au bloc de centre gauche. Une mauvaise nouvelle pour le futur Premier ministre qui aura bien du mal à constituer un gouvernement solide dans ce contexte d’éparpillement des voix et de défiance généralisée.
Le résultat d’une campagne décevante
Celui que les Israéliens surnomment « Bibi » devra composer avec des partis qu’il n’a pas vraiment choisi et des personnalités politiques dont il se méfie.
« Selon moi, il est en mauvaise posture, reprend Michal. Il va devoir faire des concessions et ne pourra plus autant s’appuyer sur les partis de droite nationaliste et religieuse. Il va devoir négocier avec le centre gauche et devra forcément confier un ministère à Lapid, au vue de ses résultats », s’enthousiasme-t-elle.
Pour les analystes politiques israéliens, Benyamin Netanyahou paye aujourd’hui les frais d’une campagne décevante. Aluf Benn, journaliste pour Haaretz, écrit : « Netanyahou n’a pas arrêté de se faire photographier avec des soldats et près du mur des Lamentations. Si cela rend bien sur une page Facebook, il en faut plus pour toucher le cœur des électeurs. » Il poursuit : « Il a échoué car il n’avait pas grand chose à dire. Il n’a proposé aucun espoir aux Israéliens, a mené une campagne pathétique, et au lieu de présenter un vrai programme, a cru s’en tirer en faisant campagne sur le thème d’un ‘premier ministre fort’. »
Malgré une campagne ratée et une élection décevante, Benyamin Netanyahou va devoir rapidement se remettre au travail pour élaborer une coalition gouvernementale efficace et homogène. Une période que ses nouveaux adversaires comptent bien mettre à profit pour se faire une place de choix dans le paysage politique du pays.
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