Héla Fattoumi et Eric Lamoureux accueillent le musicien suédois Peter von Poehl dans leur univers.
A l’évidence, la vague est un motif chorégraphique. Waves, présenté en première française aux Boréales à Caen, épouse son sujet – et son titre – avec un plaisir non feint. Une vague de danseurs emmenés par la magnifique Johanna Mandonnet qui forme un essaim de corps, sans cesse ballotté ou réuni par un effet de houle musicale. Le duo installé à Caen parle de « banc« , « notion entendue comme groupement d’individus de la même espèce qui se déplace ensemble sans hiérarchie« . Pas de chef donc, mais des personnalités prises dans le roulis ou l’écume du geste. On verra un soliste boitiller porté par ses complices, des plongeons et des disparitions. L’appel du large peut-être.
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http://vimeo.com/105871819
En contre-point et c’est la vraie réussite du spectacle, Peter von Poehl a composé une chanson étirée sur une heure, faite de motifs répétés. Un peu comme si tout un pan de la musique du XXe siècle – des minimalistes américains à la pop actuelle – se retrouvait pris au piège de sa guitare. En formule trio, avec un batteur également clavier et un violoncelliste, le Suédois explore des contrées musicales insoupçonnées. Il y a cette voix, la sienne, qui s’efface peu à peu, ce grondement électrique aussi, cet épuisement enfin. Rencontré après Waves, Peter von Poehl nous confiera qu’il a découvert la danse dans sa jeunesse. « J’avais un ami qui connaissait bien ce milieu et que j’accompagnais. Je me suis familiarisé avec cet art. Et lorsque j’ai vu Quintett de William Forsythe, j’ai vraiment eu envie de composer. »
Héla Fattoumi et Eric Lamoureux sont venus à sa rencontre : un an et demi plus tard – on imagine les longues soirées à refaire le monde… des océans -, Waves prenait corps. Comme un hommage à la musique, on verra sur le plateau la petite foule des interprètes levant les bras dans un rituel plus rock qu’autre chose. Des silhouettes collées-serrées aux suspensions de l’action, les danseurs posant un pied sur l’autre comme saisi dans l’effort, Waves déploie ses charmes. On aimerait parfois un peu plus de lâcher prise. Voir une scénographie plus inventive que ces tapis de danse placés là en vaine tentative de reproduire la vague. Un nuage de fumigène plus tard, Waves trouve une grande force visuelle. « En jouant avec la danse, on ne peut pas avoir quelque chose de trop écrit« , résume Peter von Poehl. On rêve néanmoins d’emporter cette composition avec soi après la représentation. Les Boréales festival qui, d’édition en édition, met le Cap au Nord aura réussi l’exploit de faire cohabiter cette année Jay Jay Johanson et l’Orchestre Régional de Basse-Normandie, le nouveau cirque finlandais et les fines plumes du polar scandinave. Cette vague de danse et de sons éclaboussa le tout avec allure.
Philippe Noisette
Les Boréales jusqu’au 30 novembre Caen et Région : 02 31 15 36 40
Waves, conception Héla Fattoumi et Eric Lamoureux, en tournée : 17 décembre Forum de Flers ( 02 33 64 21 21), 31 mars Centre culturel Jean Moulin Limoges, 3 avril Le Parvis Tarbes, 16 avril DSN Dieppe
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