Les Afghan Whigs continuent de fouiller leur belle obsession : faire chanter du rock brutal à Marvin Gaye. Les Afghan Whigs appartiennent à ces formations que l’on pressent incapables de décevoir vraiment ce qui assied leur renommée tout en posant leurs limites et seulement capables de publier, peu ou prou, toujours le même […]
Les Afghan Whigs continuent de fouiller leur belle obsession : faire chanter du rock brutal à Marvin Gaye.
Les Afghan Whigs appartiennent à ces formations que l’on pressent incapables de décevoir vraiment ce qui assied leur renommée tout en posant leurs limites et seulement capables de publier, peu ou prou, toujours le même album, au pedigree variable selon la clémence de l’inspiration. Faveur spéciale des dieux du binaire, ou simple et plutôt heureux concours de circonstances, 1965, sans parvenir à supplanter dans notre panthéon personnel l’ébouriffant Gentlemen, s’avère néanmoins être un cru tout ce qu’il y a de goûteux, s’avalant d’une traite, doux et onctueux comme du lait frais, âcre et revigorant comme un expresso bien serré. Au tournant pas forcément décisif du sixième album, suite à un parcours approchant de près le sans-faute, les Afghan Whigs, continuant d’allier l’énergie des Replacements et la sensualité de Marvin Gaye, déboulent avec un nouveau rejeton (presque) tout soul au monde.
Blanc et pas fier de l’être, Greg Dulli, le meneur de ces lévriers allégrement désenchantés, pourrait on ne peut plus pertinemment faire sienne une fameuse antienne de feu Nino Ferrer : lui aussi et contrairement à Michael Jackson voudrait être un Noir et ne chante d’ailleurs rien d’autre à qui veut l’entendre. Faute de parvenir à se noircir le derme, notre visage trop pâle mais pourvu par la nature d’un généreux organe vocal semble en revanche disposé à ne reculer devant aucun sacrifice parfois au détriment des morceaux (par exemple, le balourd John the Baptist), quand l’âme se vend au vilain diable de l’efficacité pour nous faire remuer le derche. Respectable mission qu’accomplissent avec une fougue ravageuse Somethin’ hot, Crazy (avec Alex Chilton en guest-star) ou Uptown again, qui devraient d’emblée convertir aux joies des trémoussements sudatoires même les popotins flasques et les gambettes ensuquées, d’ordinaire raidement repliées loin des dance-floors.
N’ayant rien, quoi que laisserait craindre son titre, d’un génuflecteur tribut à un fastueux passé révolu, 1965 est un disque alerte et vigoureux, qui éveille des pensées pas très catholiques et paraît idéalement charpenté pour faire exploser l’indice d’insatisfaction de Chrétiens-Médias vade retro, Afghanas ! Puisqu’il a tout pour déplaire aux grenouilles de bénitier, 1965, malgré une ou deux petites baisses de régime, a fatalement tout pour nous plaire. Music to make love with (en anglais lubrique dans le texte) : on ne discerne pas de plus judicieuse notice d’utilisation pour accompagner cet album vicelard, impudent, moite, gorgé de frustrations et suintant de désir, maculé de taches douteuses, sale pervertisseur de notre belle et probe jeunesse. Bref, un dur moment de rock’n’roll.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}