Plus qu’une simple copie du rock solide de Sugar, la musique de Lotion caresse la pop à rebrousse-poil. Influent, Bob Mould le fut à l’époque de Hüsker Dü: Pixies, Nirvana, Dinosaur Jr ? rien de moins ? s’en réclamèrent ou s’en revendiquent encore. Modèle incontournable, Bob Mould l’est encore sous les traits de Sugar. Et […]
Plus qu’une simple copie du rock solide de Sugar, la musique de Lotion caresse la pop à rebrousse-poil.
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Influent, Bob Mould le fut à l’époque de Hüsker Dü: Pixies, Nirvana, Dinosaur Jr ? rien de moins ? s’en réclamèrent ou s’en revendiquent encore. Modèle incontournable, Bob Mould l’est encore sous les traits de Sugar. Et pourrait presque demander des royalties aux New-Yorkais de Lotion: Dear sir, The Sad part, The New timmy et Blind for now décalquent minutieusement le fuel du père Bob. Mine affûtée, le crayon ne dérape jamais: même voix écorchée, caverneuse, exhibant un râle gracile nourri de miel pâteux. Avec une once de Michael Stipe et un doigt de Kurt Cobain. Sur Nobody s cool, Tony Zajkowsky ? dont le nom est au moins aussi difficile à prononcer que ses paroles à comprendre ?, concocte « des histoires vraies de gens inconnus » et les jette dans le lacis de guitares. Alors la partie de décalco continue: même esprit gavé d’envolées électriques, mâtiné d’une distorsion opulente. Même inclination pour l’ampleur sonore, façonnée par une meute de notes disciplinées, jamais récalcitrantes. Mues par un élan identique, elles déferlent ensemble et paraissent converger vers le même point de mire pour élaborer douze chansons qui flirtent avec la perfection. Lotion affirme pourtant fièrement sa propre identité arpèges et acoustique le lénifient, délicate attention et formidable faculté insoupçonnées chez Sugar. Désormais délivré du bien nommé popcore (Mould a reçu pour cette invention un deuxième brevet, après le hardcore), Lotion reluque sur un Yo La Tengo limitrophe, le temps d’un Precious tiny: quelques notes dévoyées, titubantes et chaotiques, une guitare ébouriffée, sauvageonne, privée de mise en plis, et les New-Yorkais apprivoisent la noisy. Tout en gardant un oeil sur leur voisin de palier Superchunk ? un Superchunk plus Chunk que Super, en deuil de sa témérité, qui respecterait sagement les limites de vitesse et s’arrêterait à la bande blanche. Flanqué d’une telle ascendance, Lotion ne pouvait décevoir. «Nous voulons être le premier groupe pop new-yorkais’, qu’ils disent. Genre de propos qui pourraient aisément faire sombrer le premier venu dans une hype assassine. Mais c’est sans faille aucune que Lotion ourdit son idéal, SA pop: «C’est seulement lorsque les fenêtres de notre local de répétition sont ouvertes que nous nous sentons proches du noise-rock ! » On a pourtant connu, même fenêtres et portes closes, climats plus sereins, guitares moins venimeuses, mélodies plus bécasses. Après Eu/I Isaac, premier album du groupe l’an dernier, Nobody s cool est donc à son tour convoqué au vernissage de la pop mode Lotion: une musique apparemment inoffensive mais qui, teintée d’un esprit propre à New York, révèle des dessous moins roses, moins digestes. Du Gros Chat (le petit label), on connaissait surtout la nonchalante désinvolture si talentueuse incarnée par Pavement. On lui connaît désormais le pelage de Lotion, tantôt lustré, tantôt hirsute: les New-Yorkais se plaisent à caresser la pop à rebrousse-poil. N’en déplaise aux puristes, elle en ronronne de plaisir.
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