Ça commence en dégageant les effluves mystérieux de l’impressionnisme français et de la féerie russe, ça finit dans le zim-boum-boum du théâtre populaire ambulant : l’album mêle sans heurts le conte lyrique d’après Andersen, Le Rossignol, et l’histoire burlesque, Renard, faite pour être chantée et jouée, et dont Stravinsky a écrit le livret. Il n’y […]
Ça commence en dégageant les effluves mystérieux de l’impressionnisme français et de la féerie russe, ça finit dans le zim-boum-boum du théâtre populaire ambulant : l’album mêle sans heurts le conte lyrique d’après Andersen, Le Rossignol, et l’histoire burlesque, Renard, faite pour être chantée et jouée, et dont Stravinsky a écrit le livret. Il n’y a pas plus contrasté. Du premier, qui se situe dans l’esprit de L’Oiseau de feu et des pages les plus étranges du Sacre du printemps où le temps semble aboli, Boulez a donné il y a deux ans une vision limpide au Châtelet. On retrouve ici Natalie Dessay qui avait déjà sorti des vocalises impeccables, en restant sobre et de bon goût. Le choeur et l’orchestre de Conlon font bien ressortir toute la modernité de cette partition et les chanteurs ont une trempe d’airain. Il suffit d’écouter la chanson du pêcheur pour avoir la chair de poule. On sent bien qu’on est entre l’Orient et notre tradition occidentale. Stravinsky a réussi une superbe synthèse de tout cela : mélodies pentatoniques, rythmes irréguliers… On perd souvent pied avec délice. Dans quelques morceaux, on sent tout ce qui le rapproche de Ravel, celui qui écrira L’Enfant et les Sortilèges. Même sens de l’alchimie instrumentale, de l’envoûtement harmonique. Conlon, qui s’échine à diffuser la musique de Zemlinsky, elle aussi ensorcelante, mérite une mention spéciale. Dans Renard, on est dans le trip Histoire du soldat : on n’est pas à l’opéra, on n’a pas de fric, on dispose de peu de moyens ; alors on invente une histoire sans queue ni tête qui se répète jusqu’à l’absurde. On se gausse d’entendre le coq susurrer sur son perchoir « Je suis sur mon bâton, je garde la maison, je chante ma chanson. » Les percussions s’en donnent à coeur joie et le cymbalum dégage ses sonorités magiques. Et pour ne pas faire taire la morale populaire : l’histoire nous a bien plu, alors payons ce qui est dû.
IGOR STRAVINSKY, Le Rossignol & Renard – Natalie Dessay, Marie McLaughlin, Violeta Urmana, Vsevolod Grivnov, Albert Schagidullin, Laurent Naouri, Maxime Mikhailov, Ian Caley Choeur et orchestre de l’Opéra national de Paris, dir. James Conlon (EMI Classics)</i
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