Inutile de consulter les encyclopédies, le Guinness who’s who of soul ou la littérature de Peter Guralnick consacrée à la musique noire américaine. Swamp Dogg n’y figure pas. Swamp Dogg, de son vrai nom Jerry Williams, est un cas à part. Une anomalie. Chanteur exceptionnel mais trop iconoclaste pour satisfaire aux critères d’une mythologie où […]
Inutile de consulter les encyclopédies, le Guinness who’s who of soul ou la littérature de Peter Guralnick consacrée à la musique noire américaine. Swamp Dogg n’y figure pas. Swamp Dogg, de son vrai nom Jerry Williams, est un cas à part. Une anomalie. Chanteur exceptionnel mais trop iconoclaste pour satisfaire aux critères d’une mythologie où l’on exige de ses impétrants une tenue correcte et un langage plus châtié, il s’est vu refuser l’entrée au panthéon des soul brothers. Les seules exceptions à cette règle de bienséance sont Screamin’ Jay Hawkins et Rufus Thomas dont le Dogg a hérité le goût immature pour la provoc et les confidences scatologiques. Dans la biographie accompagnant la parution de son meilleur album Have you heard this story édité sur Island en 1974, il se présentait ainsi : « Je suis né le 12, 13 et 14 juin 1942 en fait, je suis né le 12 mais comme je pesais déjà 14 livres, ma mère n’a fini d’accoucher que trois jours plus tard. » Vous comprenez que la carrière (hâtivement) résumée ici d’un WC Field funky ne soit comparable à aucune autre et qu’elle méritait bien ce petit retour anthologique. Le seul défaut dont aura finalement souffert cet original, c’est d’un excès de générosité. Dans sa façon de chanter qui parfois confine au beuglement, mais surtout dans sa manière de s’occuper de tout et n’importe quoi : du bon fonctionnement des services de santé, de la qualité des préservatifs, de l’inconvénient d’être noir dans un pays raciste comme les Etats-Unis, mais aussi d’écologie, d’amour et de fiscalité… Cette boulimie humanisante participe au charme de ce personnage d’autant que cette sincère indignation pour des sujets fort sérieux s’accompagne toujours d’une truculence et d’un sens de l’autodérision assez Groucho. Ajoutons à cela la qualité des accompagnements, la plupart issus des impeccables studios de Muscle Shoals où s’illustre habituellement la fine fleur des musiciens sudistes, et vous saurez quelle impardonnable négligence aurait été commise de ne pas vous recommander chaudement cet album. Y figurent en guise de bonus deux titres enregistrés fraîchement par le Dogg, une reprise reggae du Pledging my love de Johnny Ace et ce Fuck the bomb… stop the drugs dont le titre dit tout sauf la surprise de retrouver une voix toujours aussi remarquable et comme miraculeusement préservée des offenses du temps.
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