Une vidéo de l’Etat islamique montre ses militants en train de réduire en poussière des statues d’une très grande valeur dans le musée de Mossoul et sur un site archéologique en Irak. Un message adressé à ceux qui les accusaient de trafic d’antiquités.
Il y a la violence physique, celle des décapitations, des crucifixions et autres exécutions sommaires. Et il y a la violence symbolique, celle des autodafés, des destructions d’instruments de musique « impies » et des statues païennes. La palette des exactions de l’Etat islamique est large. Sa dernière vidéo, diffusé hier sur la plateforme Mediafire – et pas Youtube, trop surveillé– s’inscrit dans la seconde catégorie. On y voit d’abord des images de l’autodafé gigantesque de 8000 livres précieux le 22 février à Mossoul, en Irak. S’ensuivent des images inédites de militants de l’EI s’attaquant à coup de massues à des statues dans le musée de la seconde ville du pays, tombée dans son escarcelle en juin 2014, et sur un site archéologique. Pourquoi s’en prendre à ces vestiges ?
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« Pour eux, il n’y a de divinité que Dieu »
Selon Wassim Nasr, veilleur-analyste et journaliste à France 24, qui a pu authentifier la vidéo, une partie de ce qui a été détruit était des copies en plâtre.
#Irak une partie de ce qui a été détruit au musée de #Mossoul était des copies en plâtre pic.twitter.com/FyOj2ltaMs
— Wassim Nasr (@SimNasr) 26 Février 2015
Ce vandalisme s’inscrit cependant dans une logique propre à l’EI. Contrairement aux apparences, et en dépit de la répulsion que peuvent inspirer ces actes, les fanatiques de l’EI obéissent aux principes de leur idéologie : « Pour eux, il n’y a de divinité que Dieu, ils détruisent donc toutes les figures qui sont en contradiction avec leur interprétation rigoriste de l’islam, en l’occurrence des dieux païens ». Pour les militants de l’EI, la conservation de ces statues « relève de l’idolâtrie », rapporte David Thomson, reporter pour RFI et auteur du livre Les Français jihadistes (éd. Les Arènes) : « Dans leur esprit, c’est contraire à l’unicité de Dieu ».
Pourquoi les détruire aujourd’hui, alors qu’elles avaient traversé les époques ? « Ces reliques étaient vraisemblablement sous terre à l’époque du Prophète, raison pour laquelle, selon eux, elles n’ont pas été détruites sous son ère », rapporte Wassim Nasr, qui a pu s’informer auprès des militants de l’EI.
Cette vidéo a été mise en ligne au moment où une campagne de soutien au Califat était prévue par les pro-EI sur les réseaux sociaux. En prévision de celle-ci, de nombreux comptes Twitter de jihadistes avaient été fermés, ce qui explique son émergence tardive.
L’EI veut montrer qu’il ne fait pas de trafic d’antiquités
L’EI met en scène régulièrement dans des vidéos ses basses œuvres. C’est la base même de sa communication. « Les messages visuels ont leur importance, davantage que les messages oraux », explique l’analyste. Selon lui, il s’agit ici pour l’EI de démontrer à travers ces images qu’il n’est pas responsable d’un quelconque trafic d’antiquités pour se financer : « Ils prouvent ainsi qu’ils sont dans le droit chemin de leur idéologie, qu’ils respectent tous les préceptes, et qu’on les a accusé à tort de trafic d’antiquités ». Ces statues étaient en effet d’une grande valeur, et elles auraient pu être monnayées par l’EI pour des dizaines de millions d’euros.
En juillet 2014, l’EI avait dynamité la tombe du Prophète Jonas à Mossoul, car elle était devenue un mausolée et un lieu de pèlerinage. Le même principe avait alors guidé leurs pas, considérant que cette adoration relevait de la mécréance et de l’apostasie. Ces saccages ne sont pas sans rappeler ceux des bouddhas de Bamiyan, datant du Ve siècle, par les talibans en Afghanistan en février 2001.
http://www.youtube.com/watch?v=1jITkdB2xZM
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