Oubliez tout ce que vous savez : les Afghan Whigs ne sont pas américains et ceci n’est pas leur quatrième album. “Such a little thing, such a big difference.” La “si petite chose”, c’est ce supplément d’âme qui distingue les Afghan Whigs, cette spiritualité supérieure qui a toujours séparé le groupe de Greg Dulli du […]
Oubliez tout ce que vous savez : les Afghan Whigs ne sont pas américains et ceci n’est pas leur quatrième album.
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« Such a little thing, such a big difference. » La « si petite chose », c’est ce supplément d’âme qui distingue les Afghan Whigs, cette spiritualité supérieure qui a toujours séparé le groupe de Greg Dulli du troupeau grunge même lorsque la bande officiait sur le label Sub Pop. Quant à la « si grande différence », elle se mesure mieux que jamais à l’écoute de Black love, quatrième album d’un groupe qui, à force d’être un tout petit peu plus malin que le reste de la meute, vient d’accoucher d’une douzaine de chansons effectivement hors norme. Comme quoi, comme dirait l’autre, ça ne tient quand même pas à grand-chose, la vie d’un groupe de rock : une mine bien faite le délit de bonne gueule, synonyme ici d’accès prioritaire aux médias , un potentiel en perpétuelle régénération et un capital intact d’intentions flatteuses, parmi lesquelles cette promesse unique de faire se rencontrer le rock maladif d’Hüsker Dü et les traditions nobles de la musique soul. Sur ces quelques vertus incontestées, les Afghan Whigs et leur beau brun de chanteur auront gagné beaucoup : la confiance grandissante du public et celle (moins évidente) de la critique, miraculeusement disposée à remettre les compteurs à zéro à chaque nouvelle apparition du groupe. C’est donc avec l’oreille habituellement réservée aux nouveaux venus qu’il conviendra d’apprécier la dernière livraison du groupe de Dulli. Oubliez tout ce que vous savez : ce groupe n’est pas américain comment pourrait-il l’être ? Une fois chassées les préconceptions douteuses mouais, encore un groupe de Yankees qui traînent le godillot , toute la saveur ambrée d’un disque complexe se révélera : mélodies à la verve éminente, profondément paradoxales (étonnamment vivifiantes dans leur noirceur épineuse), textes ardents et délicats, guitares tranchantes comme des couteaux de boucher lorsqu’elles renoncent à leur subtilité, jeu savant sur les silences, les retenues, les suspensions. De Crime scene part one, ouverture farouche et menaçante d’un disque en équilibre instable, aux notes aiguisées qui le referme, c’est un même cri pénétrant, celui d’un désespéré qui se refuse aux larmes. Tout ce que les Afghan Whigs ne faisaient que promettre depuis leurs obscurs débuts Cincinnati, Ohio, il y a déjà huit ans s’étale ici avec la précision maniaque de la bombe à retardement : une explosion d’autant plus libératoire qu’elle s’est fait (un peu) attendre.
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