Campagne publicitaire retirée dans certains départements d’Ile-de-France, attaque en justice : le site de rencontres extraconjugales Gleeden est dans le collimateur des associations catholiques.
« Retour en force de l’ordre moral » comme le chantait NTM en 1998 ou polémique feu de paille ? Gleeden fait en tout cas, bien malgré lui, encore parler. Le site de rencontres extraconjugales est aujourd’hui attaqué en justice par les Associations familiales catholiques. Les AFC veulent que « la justice se prononce sur la légalité de la campagne Gleeden et du site correspondant, dont l’objet est de faciliter l’adultère et de faire, à travers lui, la promotion publique de la duplicité, du mensonge et de la violation de la loi« . Elles ont donc assigné devant le tribunal de grande instance de Paris la société américaine BlackDivine, éditrice du site.
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En 2011, Gleeden avait déjà attiré l’attention grâce à une campagne publicitaire aux slogans politiquement incorrects tels que « Tout le monde peut se tromper. Surtout maintenant » ou « Par principe, nous ne proposons pas de carte de fidélité« . Et de plus en plus, les publicités s’affichent en 4 par 3 sur les quais du métro ou du RER parisien. Fin janvier, le site a même réalisé un gros coup de communication en montant un stand au Salon du mariage porte de Versailles…
http://www.youtube.com/watch?v=MadBZuqYkfU
Les associations catholiques passent à l’attaque
Cette fois, les AFC ont décidé de ne pas laisser Gleeden tranquille. Contacté par Les Inrocks, leur avocat Me Henri de Beauregard tient en premier lieu à sortir de l’opposition simpliste “cathos coincés contre bobos libérés. Ce débat mérite mieux que les caricatures que l’on peut en faire ! clame-t-il. A l’étude depuis plusieurs mois« , l’action en justice a donc été lancée pour montrer que le site et sa communication « reposent sur une cause illicite« . Me de Beauregard estime qu’il y a là « une vraie question juridique« .
“La justice serait un peu schizophrène à juger le matin que la consultation de ce genre de site est une faute justifiant le divorce – ce que la Cour de cassation juge – et l’après-midi qu’une société peut faire profession de promouvoir cette faute. Gleeden fait un business de l’adultère !”
Un business qui a déjà provoqué l’indignation sur les réseaux sociaux, Twitter notamment. Le compte Anti Gleeden milite ainsi pour la “disparition du territoire français du site Gleeden.com”. Et recueille sur sa page de nombreux témoignages de gens outrés et mécontents.
Ceux qui défendent le site de rencontres #Gleeden peuvent-ils se plaindre ensuite que les jeunes fassent n’importe quoi? #SociétéSansRepères
— reinedetrianon (@reinedetrianon) 19 Février 2015
Schizophrénie des maires qui lisent le code civil aux époux mais refusent ensuite d’interdire les affiches Gleeden qui appelle à le violer.
— Hérisson Dissident ن (@Herissident) 18 Février 2015
Me de Beauregard renchérit : « Alors que, du fait de la désagrégation des liens sociaux, le ministère de l’Education envisage des cours de ‘morale laïque’, juge-t-on souhaitable ou même normal que l’on fasse la promotion de la violation de la loi, de la duplicité et du mensonge ?”
“On n’a pas inventé l’infidélité ! » se défend Solène Paillet, porte-parole de Gleeden, jointe par téléphone et qui assure qu’à ce jour Gleeden n’a toujours pas reçu officiellement d’assignation en justice.
“On ne comprend pas bien cette attaque, poursuit-elle. Le site existe depuis plus de cinq ans, on répond à une demande existante. Gleeden est dans le top 5 des sites de rencontres en France. On compte 2,3 millions de membres dans le monde, dont plus d’un million rien qu’en France ! »
Les publicités retirées de certains réseaux de transport
Malgré ce succès indéniable, Gleeden est depuis quelques jours déjà au cœur des débats. Comme le rapporte Metronews, des affiches ont en effet été retirées dans certaines communes des Yvelines. Exit les publicités sur les bus à Versailles, Rambouillet, Poissy, Chatou ou encore Saint-Germain. Dans les Hauts-de-Seine, Sèvres a également vu la disparition des affiches à la pomme croquée. Les réseaux de transports Transdev et Keolis sont notamment concernés ; Keolis aurait ainsi retiré les publicités pour “répondre aux attentes des voyageurs”.
Cité par Metronews, le maire UMP de Rambouillet Marc Robert a lui-même pris les devants. « En ma qualité d’officier d’état-civil, j’estime que cette publicité est clairement une incitation au non-respect du code civil qui stipule que les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance » a-t-il déclaré. Lancée le 9 février dernier par Les Précurseurs, un groupe catholique conservateur, une pétition en ligne propose également de signer contre l’affichage des publicités du site de rencontres extraconjugales.
Ce retrait de la campagne publicitaire de Gleeden avant la fin du contrat d’affichage conclu avec Médiatransports fait réagir sa porte-parole. « Nous avons l’habitude d’afficher en Ile-de-France et pour ça, on doit d’abord obtenir l’autorisation de l’Autorité de régulation de la publicité (ARPP) et du service juridique de Médiatransports« , explique Solène Paillet. « Malheureusement on ne peut pas faire grand-chose contre ça, à part demander une compensation financière à Médiatransports qui n’y est pour rien dans cette histoire… »
Etroitesse d’esprit contre drames familiaux
Lorsqu’on lui demande ce qu’elle pense de cette attaque en justice, Solène Paillet se montre d’abord déconcertée avant d’être un peu plus incisive. « On se rend compte que les associations qui se mobilisent contre Gleeden sont les mêmes qui manifestent contre le mariage pour tous. Ces gens-là ont du mal à voir la société évoluer, ils manquent d’ouverture d’esprit. »
Henri de Beauregard préfère de son côté pointer du doigt les « drames familiaux » que peut engendrer la fréquentation d’un site comme Gleeden et ironise sur l’argument « chacun est libre de faire ce qu’il veut« . « Les gens qui critiquent notre action se mettent à la place du « trompeur », pas du « trompé ». Celui-ci n’est pas « libre » d’être trompé, « libre » d’être délaissé, les enfants ne sont pas « libres » de voir leur famille se déchirer à la suite d’un adultère. »
Solène Paillet répond, elle aussi, avec une petite pique. « Selon une étude que nous avions réalisée à partir des données de notre site, Versailles est la cinquième ville en matière de personnes infidèles inscrites sur Gleeden, ce qui représente 11 % d’inscrits sur toute la France. » Avant de conclure : « Nos publicités ne sont pas méchantes, on essaye juste de faire sourire et réfléchir les gens à ce sujet. »
L’affaire Gleeden a en tout cas déjà stimulé les internautes.
Pourquoi juste demander l’interdiction de la pub #Gleeden? Vite! un autodafé pour Les Liaisons Dangereuses. Et Le Diable au Corps. #Adultère
— Olivier Siou (@oliviersiou1) 19 Février 2015
L’argument massue des droiteux versaillais :-) ou comment passer de #gleeden à l’aide sociale à l’enfance.Décomplexés pic.twitter.com/GRUNYhK3Pr
— Lorenzo (@LCensur) 19 Février 2015
Si l’issue de cette bataille juridique est désormais entre les mains de la justice, une chose est déjà certaine : les AFC ont offert à Gleeden l’une des meilleures publicités qui soient.
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