Il aura fallu douze albums pour que Guided By Voices touche les dividendes d’une carrière méritoire. Etrangement, on a toujours su que Guided By Voices allait finir par sortir ce disque, le disque. Le couronnement, le pic, la grande œuvre. Celle qui fait la somme, ou mieux encore : qui remplace les autres, fait table […]
Il aura fallu douze albums pour que Guided By Voices touche les dividendes d’une carrière méritoire.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Etrangement, on a toujours su que Guided By Voices allait finir par sortir ce disque, le disque. Le couronnement, le pic, la grande œuvre. Celle qui fait la somme, ou mieux encore : qui remplace les autres, fait table rase du passé et s’étale de tout son long dans l’espace laissé vacant. Il en va de cet album comme de peu avant lui (le Giant steps des Boo Radleys, le Screamadelica de Primal Scream ou le Isn’t anything de My Bloody Valentine, ce genre de claques) : à l’entendre, on ne peut qu’envoyer au fossé les tristes fadaises colportées sur ses fervents bâtisseurs. Non, donc, les Américains de Guided By Voices n’étaient pas d’insupportables dilettantes, ou alors pas seulement, eux qui font montre avec Under the bushes under the stars déjà le douzième album d’une carrière faussement oisive d’un sens rare de l’application et de l’entêtement. Non, donc, le groupe de Robert Pollard n’était pas aussi porté sur le dépouillement et le flou artistique que ses cafardeux copains de la division lo-fi, lui qui rend ici une copie soignée comme rarement, relue et corrigée par deux maîtres enviables, Kim Deal et Steve Albini. Et si ces musiciens restent partisans des bidouillages maison, ce n’est que par l’effet contradictoire d’un perfectionnisme qui préférera toujours l’ambiance sourde et feutrée de la cave au marbre clinquant des studios high-tech. Ainsi parés, les hommes de Guided By Voices affichent sur Under the bushes under the stars une inspiration enfin ramenée à l’essentiel le groupe a fait le tri dans ses idées, ne gardant que les plus simples, les plus honnêtes, soit quand même vingt-quatre chansons , doublée d’une densité instrumentale qui semblerait suspecte chez n’importe quel groupe fraîchement formé. Dépassant probablement les limites de sa propre ambition, Guided By Voices vient tout bonnement d’enfanter le disque de ses rêves les moins sages, mariant la grâce fragile de mélodies pop à l’intensité d’un rock plus ténébreux. La beauté de guitares élevées chez les Replacements vient éclairer un tableau souvent menaçant (les poignants Bright paper werewolves et Look at them), offrant un brillant écrin à quelques moments lumineux (The Official ironmen rally song et son refrain d’exception). Soutenu depuis toujours par une poignée d’aficionados fidèles des accros chez Pavement, un parrain en Thurston Moore, une poignée de journalistes-supporters, quelques milliers de fans et bénéficiant enfin d’une carte de visite somptueuse, le groupe de l’Ohio semble prêt pour les plus hautes fonctions dans l’appareil rock mondial : quelque part entre Pavement et REM.
{"type":"Banniere-Basse"}