Depuis qu’on sait que l’adorable Ben Vaughn, miraculeusement parachuté à Hollywood, gagne sa croûte en composant des musiques de feuilletons télé, on veut bien croire que l’ultime ambition de ce nostalgique impénitent soit de participer à la bande-son d’une énième mouture de La Nuit des morts vivants. Dans la foulée, il pourrait même souffler quelques […]
Depuis qu’on sait que l’adorable Ben Vaughn, miraculeusement parachuté à Hollywood, gagne sa croûte en composant des musiques de feuilletons télé, on veut bien croire que l’ultime ambition de ce nostalgique impénitent soit de participer à la bande-son d’une énième mouture de La Nuit des morts vivants. Dans la foulée, il pourrait même souffler quelques noms pour le casting : son carnet de commandes déborde de cadavres exquis , de spectres brindezingues qu’il exhume de leur placard le temps de disques indicibles. On n’évoque pas sans un effroi certain le garage-rock de terre brûlée qu’il équarrît l’an passé pour le compte de Kim Fowley, mégalomane hystérique fané depuis belle lurette. La chose dut faire grand bruit dans le Landerneau des vieilles gloires brisées parce que, depuis ça, on se bagarre sur le pas de porte de l’ami Ben, on se le dispute entre has-been patentés et losers certifiés. Mais comme son emploi du temps reste très serré production du récent Ween, réalisation de son dernier album intégralement enregistré dans l’habitacle de sa Rambler 65 et qu’il ne sait pas dire non, il lui faut parer au plus pressé, organiser des stages de groupe. Voilà comment on hérite du générique hétéroclite de ce Cubist blues où s’entrechoquent, outre le gentil Ben, un Alex Chilton hébété et un Alan Vega hanté comme jamais. Blues donc, mais cubiste. Blues déstructuré, disséqué, restructuré les yeux bandés, en mille dimensions, puis noyé dans un écho de cathédrale en ruine. Vega dont les halètements priapiques écartèlent les chansons jusqu’à leur point de rupture et les siens, en parfaite cohésion, reprennent les choses là où les a laissées, gisantes, Jon Spencer. Un blues confisqué aux encyclopédistes et aux gratteux incontinents, rendu à une jeunesse insolente. Jamais auparavant le blues n’avait été si nu, si indécent, si désemparé, exposé sous toutes ses coutures, tous ses angles multiples, coupé net de toutes ses racines répertoriées. Un remodelage analytique qui intègre, à des squelettes de mélodies, des séquences de synthés suicidaires, la résonance grave d’un piano gothique, le battement de guitares robotiques. Ainsi soumis au supplice de la goutte d’eau, le blues triomphe, exulte, congratule ses tortionnaires.
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