Groupe de bilieux et sans répit, Shunk Anansie cafouille en studio à retrouver l’impressionnante brutalité sèche des concerts. En quittant la rue pour se vautrer à l’arrière des limousines, le rock s’est perdu dans un rôle de représentation qui n’était pas le sien. Il n’a dû sa survie qu’à ses sursauts de fierté, sa faculté […]
Groupe de bilieux et sans répit, Shunk Anansie cafouille en studio à retrouver l’impressionnante brutalité sèche des concerts.
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En quittant la rue pour se vautrer à l’arrière des limousines, le rock s’est perdu dans un rôle de représentation qui n’était pas le sien. Il n’a dû sa survie qu’à ses sursauts de fierté, sa faculté à reprendre pied dans le réel quand on le croyait perdu dans l’espace, à quitter les rivages du métaphysique pour recouvrer sa fonction contestataire et son rôle politique. Quinze ans après l’insurrection punk, le phénomène fusion a figuré une nouvelle prise de conscience et célébré Rage Against the Machine comme porte-voix d’une Amérique – puis d’une Europe – en colère. Surclassé par le rap, tant dans la force de déclamation que dans la théorie, ce sursaut nerveux s’est finalement perdu dans la tiédeur, les prouesses techniques – les bassistes aux doigts d’araignée, les guitaristes bavassous -, les digressions stylistiques et son sens aigu du spectacle et de la frime tatouages/biscoteaux. Son principal mérite aura été d’autoriser la réhabilitation de l’infatigable Henry Rollins. Dès Selling jesus, Skunk Anansie établit un pont direct avec ce parrain transatlantique. Dans la pureté de la forme musicale d’abord. Lourd, le rock de Skunk Anansie n’a rien d’aéré, il vibre comme un boyau que l’on vient de pincer, prend position et rejoint le radicalisme du hardcore-metal.
Pas question ici de céder la moindre parcelle de guitare à un quelconque easy listening, les textes furieux de Skin ne le supporteraient pas. Comme Rollins,la chanteuse de Skunk Anansie n’est pas là pour s’autoflageller et s’apitoyer sur des histoires de boyfriend : les deux semelles dans le désespoir, abandonnant aux sociologues les segments types et les théories explicatives (Intellectualise my blackness), ils chroniquent le quotidien d’une dérive sociale à son paroxysme. Fenêtre sur cour pas très ragoûtante de Brixton, Paranoid+Sunburnt prend comme héros les exclus, les gamins paumés ,les anciens et dénoncent les postures condescendantes des intellectuels et des politiques face à la dégénérescence du lien social (le soufflant Little baby swastikkka). Dans ces témoignages, Skunk Anansie se pose clairement en groupe citoyen : les laissés-pour-compte, par millions, lui diront vite merci.
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