Anouk Ricard, dessinatrice de poilantes BD anthropomorphes (Coucous Bouzon, Planplan Culcul) et habituée du Festival d’Angoulême, présente, après plusieurs sélections, une exposition consacrée à ses personnages jeunesse, Anna et Froga, une petite fille et une grenouille.
L’enfant est-il un lecteur comme les autres ?
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Anouk Ricard – Oui, je crois… Je ne m’adresse pas qu’aux enfants, mes livres sont tout public. Souvent les lecteurs sont des adultes, parfois ils lisent en famille, ce qui concerne aussi les enfants qui ne savent pas lire, c’est un accompagnement. Mon style (Des personnages anthropomorphes NDLR) n’est pas nouveau. Pour moi, ce sont des humains, ils ont un comportement normal, je ne leur attribue pas les traits d’animaux (par exemple, l’éléphant n’a pas de super mémoire). C’est une apparence qui permet de jouer avec les différences de formes et de couleurs.
Les contraintes d’écriture varient-elles en fonction des publics ?
L’essor de la BD jeunesse est récent, comme celui de la BD adulte et du roman graphique, par le biais d’éditeurs comme L’association, qui n’existaient pas. Avant, on lisait des albums tout public qui n’étaient pas considérés comme de l’art. Moi, je ne sais pas dessiner autrement, de toute manière ! J’ai commencé la BD adulte en 2008 avec Commissaire Toumi, une énigme policière. Les éditions des Requins marteaux ont été les premiers à me suggérer de le faire, j’ai donc commencé dans leur magazine, Feraille. Ils m’ont ensuite sollicité pour une BD cul, Planplan Culcul. En ce moment, je fais des faits divers pour le site d’Arte, Personne ne bouge. J’ai aussi un projet d’adaptation de roman en BD dont je ne peux pas trop parler encore…
Quelle est la genèse de votre vocation ?
Comme tous les enfants, je dessinais. Au collège, je voulais faire des études artistiques, mais je ne pensais pas que j’allais faire de la BD. Je me voyais artiste-peintre, comme mon personnage de Bubu, le chien. Quand je suis arrivée aux Arts Décos de Strasbourg, j’ai découvert la section illustration : je ne savais même pas que ça existait comme métier, illustrateur. Là j’ai compris que c’était ce que je voulais faire. Je n’aimais pas du tout parler de mon travail, je n’ai pas la parole facile, j’ai du mal à défendre mes idées : or, durant ces études, il fallait participer à des « confrontations », des échanges où chaque élève présentait son travail devant le prof. J’étais vraiment nulle, ça ne m’allait pas. Avec l’illustration, l’image parle d’elle-même, sans discours.
Il s’agissait déjà à l’époque de dessin humoristique ?
Forcément, ça part de loin. C’est un style que j’ai affiné au fil des années. J’avais déjà un book humour à la sortie de l’école.
Étiez-vous une lectrice vorace ?
Oui, très. Ca m’étonne de ne pas avoir pensé plus tôt à en faire un métier, d’ailleurs. Je lisais tous les classiques, ma mère achetait Astérix, Lucky Luke, Tintin, Gaston Lagaffe… Snoopy et Mafalda ont encore une grande influence sur mon travail : c’est un dessin enfantin qui tient en fait un discours plus grave. Dans la BD contemporaine, j’adore Lewis Trondheim, Riad Satouff, Pierre La Police.
Avez-vous de l’affection pour le dessin satirique de Charlie Hebdo ?
Je ne l’ai jamais vraiment lu, ça peut me plaire, ça dépend. La politique ne m’attire pas, pour mon métier, j’aime mieux les fictions un peu débiles, moins concrètes.
Où en est l’industrie de la BD sur la question des droits d’auteurs ?
La question c’est, « Est ce que les éditeurs devraient sortir autant de livres ? ». Certains pensent que les éditeurs devraient faire ce qu’ils veulent et que c’est aux auteurs de défendre leurs droits. Mais si tous les éditeurs font ça, les auteurs n’auront personne vers qui se tourner pour une reconnaissance. Plus on sort de livres, moins les auteurs sont payés, ils reçoivent moins d’avance sur les droits et vendent moins d’albums. Cela pose la question de la sur-production. Nous avons des réunions à ce sujet et une marche est prévue (na : Marche des auteurs et de soutien à la création prévue samedi 31 janvier à 14h30 à Angoulême). Je ne suis pas très pointue sur ce sujet mais, notamment à cause de la réforme du régime de retraite complémentaire obligatoire (RAAP), je subis la même précarisation que tous les auteurs.
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