A 20 ans, Kula Shaker parle couramment le psychédélisme ancestral, avec un ton, une fougue et un naturel confondants. Un ovni dans le ciel anglais. De bonnes petites frimousses, pourtant, auxquelles on donnerait volontiers les bidons des Gallagher à porter. De braves joueurs de division 2, ventre mou, objectif maintien vaille que vaille. Et ce […]
A 20 ans, Kula Shaker parle couramment le psychédélisme ancestral, avec un ton, une fougue et un naturel confondants.
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Un ovni dans le ciel anglais. De bonnes petites frimousses, pourtant, auxquelles on donnerait volontiers les bidons des Gallagher à porter. De braves joueurs de division 2, ventre mou, objectif maintien vaille que vaille. Et ce disque, complètement hors du cadre, en plein dans un autre mille. Poussé à bout de nerfs ou ronronnant comme une compagnie de chats de gouttière, Kula Shaker intrigue. Sa façon de glisser sur les décennies ne saurait être uniquement la résultante cynique d’un art calculé. Il y a forcément du génie dans ce recyclage pointilleux. On ne tutoie pas promptement King Crimson et les New Yardbirds (proto-Led Zeppelin de 1969), le Pink Floyd de Syd Barrett et Vanilla Fudge tous agrégés en un seul discours parfaitement étayé sans connaître à fond les mécanismes du langage et de la bienséance. On peut apprendre, ceux-là semblent comprendre. Si la trame psychédélique trouve effectivement ses marques en de lointains enseignements, d’autres éléments, comme la voix fluide de Crispian Mills ou la production tranchante de John Leckie, s’accrochent à leur époque comme autant de tiques sur un jeune loup. La musique de Kula Shaker est pleine de ces ambivalences consenties, comme la superposition d’une image très claire et de son reflet dans une eau légèrement troublée par les vents d’hier. Pour qui se souviendrait encore de Camel, le groupe bab rêveur par excellence au nom boucané et euphémique, en voici une réminiscence au cœur de la brit-pop moderne. Plus incisive forcément, plus lapidaire, violente à l’occasion, à la demande (ou à l’image) du temps en somme. Avec un petit côté Byrds pour sauver le mysticisme de la noyade. Avec la sauvagerie intériorisée des Pretty Things quand il faut arracher le morceau. Le Grateful when you’re dead/Jerry was there, plus Ten Years After que Grateful Dead, n’était pas indispensable pour la bonne compréhension du disque, mais d’autres Knight on the town, Into the deep ou Tattva en assurent la cohérence et la brillance. Les chocs culturels (tablas indiens contre guitares viscéralement anglaises, cachemire mélodique contre bure rythmique), qui auraient pu dégénérer en conflits ouverts, servent un même dessein, inédit au bout du compte. Et si l’analogie graphique liant 1969 et 1996 n’a échappé à personne, jamais l’amalgame n’aura été aussi crédible.
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