Un coffret déchire l’image d’Epinal collée à AC/DC, plus proche d’un blues morveux que d’un hard graisseux. Comme pour les coffrets Joy Division ou Doors récemment sortis, il s’agit ici de décorer à titre posthume Bon Scott, le chanteur originel d’AC/DC, de l’ordre du mérite du rock et de mettre fin au commerce parallèle des […]
Un coffret déchire l’image d’Epinal collée à AC/DC, plus proche d’un blues morveux que d’un hard graisseux.
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Comme pour les coffrets Joy Division ou Doors récemment sortis, il s’agit ici de décorer à titre posthume Bon Scott, le chanteur originel d’AC/DC, de l’ordre du mérite du rock et de mettre fin au commerce parallèle des pirates. Mais alors que les deux autres coffrets exhumaient deux groupes déjà nimbés d’une pontifiante légende, ce package commémoratif déchirera sévère deux images d’Epinal encore en vigueur : celle d’un quarteron de mulets prédébiles d’abord, entrés au chausse-pied dans des futals moule-burnes et des débardeurs de jean crados, tout juste capables d’apporter de l’eau au moulin de la légende du rock joué fort pour emmerder père et mère ; celle, ensuite, d’un groupe estampillé hard et obligé, à ce titre, de frayer dans les mêmes bacs à disques que des clowns infréquentables (Kiss, Iron Maiden, Scorpions…) et des buses de première catégorie (Ozzy Osbourne, Judas Priest).
« Le rock a fait un retour en arrière avec des choses comme Woodstock et les hippies. Nous pensons être la première cassure entre ces choses folkies et le reste. Les Easybeats étaient le dernier groupe de rock que j’ai aimé. On a décollé au moment où ils se sont arrêtés », déclarait Bon Scott en 1978 dans un élan de fayotage caractérisé (le leader des Easybeats n’était autre que George Young, producteur d’AC/DC et frère aîné de ses deux muscles increvables Malcolm et Angus). Bon point : car, si l’intelligentsia du rock a longtemps célébré les Rolling Stones comme joailliers attitrés du blues de Willie Dixon ou vu dans les Who une réincarnation de la dinguerie de Little Richard, elle a rarement fait cas de la part de travail accomplie par AC/DC dans la réappropriation britannique de la musique blues et rock noire. Car si le groupe porte passeport australien, personne n’est dupe : AC/DC est fondamentalement britannique. Une filiation rétablie symboliquement par leur reprise du School days de Chuck Berry sur Volts (le troisième volet anecdotique de ce coffret compilant raretés et premières versions studio de Whole lotta Rosie, Get it hot, Touch to much, If you want blood, Beating around the bush…) et définitivement soudée par le concert radiodiffusé depuis les Atlantic Studio, objet du premier volume de ce Bonfire. Dans des conditions proches de celles des Black Sessions (public confidentiel, son brut de décoffrage), AC/DC y joue son blues blanc électrocuté, à peine ébarbé, jouissif et terriblement cousin de celui des Who (avant les élucubrations babas et la quête de crédibilité quadrophéniaque), un rock de prolos nourris à l’énergie de Chuck Berry et élevés au combat de rue, imbibés de Muddy Waters. Une musique imperturbable, aussi à l’aise en comité restreint que soumise à l’épreuve du son et des salles déjà trop grandes, comme en témoigne le dernier document sonore de Bonfire, la bande-son (surcotée sur le marché du bootleg) du mémorable live au Pavillon de Paris de 1979. Une tournée depuis laquelle le fonds de commerce du groupe ne variera plus d’un iota mais aussi la date inaugurale du mythe AC/DC et de toutes ses dérives merchandising : autocollants, porte-clés ouvre-bouteilles (de bière ?), posters débiles dont la présence dans ce coffret constitue la seule mauvaise note.
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