De « Take Shelter » à « Camille redouble » en passant par « Holy Motors », les 20 meilleurs films de l’année sélectionnés par la rédaction.
1. « Holy Motors » de Leos Carax
Parfois, comme une fronde lancée à la gueule de l’uniforme et du tiède, un film se démarque, sabote les certitudes et laisse à l’œil une impression inédite. Pour son cinquième long métrage en trente ans, Leos Carax déroule ainsi les errances hallucinées d’un homme (sidérant Denis Lavant !), la multiplicité de ses visages. Et chante en creux – poète visuel – son amour pour le cinéma.
2. « Tabou » de Miguel Gomes
Écho et prolongement du film du même nom de Murnau (1931), le troisième long métrage du Portugais Miguel Gomes explore, mutique et sublime, l’amour, ses soubresauts, les sacrifices qu’il exige, sa persistance à travers les âges. Sans emphase, la romance dépeinte pénètre le champ plus vaste de l’histoire, lui-même fondé sur les destins singuliers qui s’y meuvent. Une fresque bouleversante.
3. « In Another Country » d’Hong Sangsoo
Triptyque gracile hanté par le charme et la légèreté d’Isabelle Huppert, sorte de concerto en trois mouvements juché au creux d’une station balnéaire coréenne morte d’ennui, l’ensemble déploie l’idée d’une existence pareille à un voyage, et du pouvoir de la fiction à bouleverser le réel. Une excursion hors temps et hors clichés, à suivre sans hésiter.
4. « Twixt » de Francis Ford Coppola
Objet composite, bricolé autant que virtuose, sarcastique et profondément noir, Twixt exhale sous ses apparences de thriller gothique des relents d’Amérique en fin de course. À l’image de cet écrivain loser (Val Kilmer) boursouflé par l’alcool et obsédé par une seule phrase, le pays souffre, enlisé dans la répétition du même et incapable de renouveler sa propre mythologie. Coppola résiste, et livre ce film libérateur.
5. « Damsels in Distress » de Whit Stillman
Après les milieux fortunés new-yorkais, l’Espagne et le disco, le trop méconnu Whit Stillman s’empare de la vie d’un campus universitaire. Gorgé de règles ancestrales et de bonnes manières, ce petit monde risque d’imploser sous la menace de la fureur extérieure et par son manque d’adaptation. Certes, la décadence guette, les valeurs s’effondrent, mais Stillman, précis et raffiné, échappe avec brio au chaos ambiant.
6. « 4h44, dernier jour sur terre » d’Abel Ferrara
Via les failles et obsessions de cellules humaines délimitées, scruter et peindre l’universel. À l’instar de Melancholia de Lars von Trier, Ferrara saisit l’ampleur d’une époque, en traque les ombres par le recours à l’intime et au singulier. Soit un acteur et une peintre, un amour, des relations, des images, et la fin du monde, imminente. Un projet crépusculaire, une réussite totale en cette année apocalyptique.
7. « Camille redouble » de Noémie Lvovsky
Les adultes sont-ils des enfants qui ont mal tourné ? De la gueule de bois d’une quadra à l’ivresse adolescente, l’itinéraire à rebours de Camille (Noémie Lvovsky) interroge une existence qui, par lâcheté et à mesure des rencontres, s’est métamorphosée. Quête identitaire, franchissement du miroir: une Alice en somme, égarée au pays de son intime, pour mieux se retrouver.
8. « Looper » de Rian Johnson
Aux refrains crépusculaires et factices ressassés par les blockbusters en vogue (The Dark Knight Rises, Skyfall), Looper oppose une vivacité et une musicalité neuves. Ici, les barrières temporelles implosent, les identités se confondent, les visages se brouillent. Victimes et complices, héros et salauds : les distinctions ordinaires n’opèrent plus dans cette intrigue dense, aussi complexe et passionnante que l’existence elle-même.
9. « Un monde sans femmes » de Guillaume Brac
L’été à Ault, station balnéaire picarde. Un homme timide et un peu gauche loue son appartement à deux femmes (une quadra et sa fille ado). Ajoutez au groupe un flic beauf et l’ensemble se mue en un quatuor animé par la musique des sentiments et les jeux de séduction. Un très beau premier moyen métrage, à la croisée de Rohmer et de Jacques Rozier.
10. « L’Âge atomique » d’Héléna Klotz
L’adolescence, ses névroses, sa soif de vivre, sa fragilité, sa vitalité, sa mélancolie. Pour son premier film, Héléna Klotz est parvenue, à travers les errements nocturnes de deux garçons, à rendre la complexité de ce moment si particulier de l’existence. Un tiraillement perpétuel déjà palpable dès le titre, emprunt à Elli et Jacno, chantres d’une modernité désenchantée.
11. « Take Shelter » de Jeff Nichols
12. « L’Été de Giacomo » d’Alessandro Comodin
13. « The Day He Arrives (Matins calmes à Séoul) » d’Hong Sangsoo
14. « Barbara » de Christian Petzold
15. « Fengming, chronique d’une femme chinoise » de Wang Bing
16. « Laurence Anyways » de Xavier Dolan
17. « Moonrise Kingdom » de Wes Anderson
18. « Go Go Tales » d’Abel Ferrara
19. « Amour » de Michael Haneke
20. « Les Chants de Mandrin » de Rabah Ameur- Zaïmeche