Tes chansons donnent souvent l’impression d’avoir été écrites comme des histoires courtes. En es-tu amateur ? Je me suis lancé dans l’écriture de livres longtemps avant d’enregistrer des chansons. Mais l’écriture est un travail qui demande une discipline que je ne possède pas, si bien que tous ces projets s’entassent sur un bureau chez moi […]
Tes chansons donnent souvent l’impression d’avoir été écrites comme des histoires courtes. En es-tu amateur ?
Je me suis lancé dans l’écriture de livres longtemps avant d’enregistrer des chansons. Mais l’écriture est un travail qui demande une discipline que je ne possède pas, si bien que tous ces projets s’entassent sur un bureau chez moi et que je suis devenu une sorte de romancier frustré. En fait, je n’ai réussi à m’approcher du format de l’histoire courte qu’au travers de chansons comme Strawberry blonde ou encore From a few streets over inspirée par un roman de Ray Bradbury intitulé Something wicked this way comes. C’est un roman mineur dans l’oeuvre de Bradbury, mais qui m’a beaucoup marqué : une histoire fantastique dans laquelle deux garçons montent un plan pour démasquer les membres d’un cirque « démoniaque ». A l’époque où je lisais cette histoire, il y avait un marchand de glaces qui venait constamment garer son van devant ma maison parce qu’il savait que j’avais des enfants. Il mettait sa musique à fond, et mes gosses n’arrêtaient pas de s’agiter pour avoir des glaces que je ne pouvais pas leur payer parce que j’étais fauché. Il m’est venu à l’esprit que je pourrais écrire une petite histoire fantastique à ce sujet, à la manière d’un épisode de la Quatrième dimension : un père de famille qui rêve d’envoyer le vendeur de glaces brûler en enfer et qui voit son souhait exaucé.
Quel type de livres apprécies-tu particulièrement ?
J’ai une préférence pour les thrillers bien construits mais je ne suis pas contre une bonne nouvelle policière, voire un recueil de poésie de Bukowski ou de Walt Whitman, des auteurs dont je me sens proche, tant dans l’apparente simplicité de l’écriture que dans les thèmes abordés. J’adore les histoires vraiment effrayantes, comme celles d’Edgar Allan Poe : tout à fait le genre de choses que je rêve d’écrire un jour. Mais je ne suis pas un « accro » de littérature fantastique. Celle de Stephen King, disponible en supermarché, me laisse totalement indifférent.
A quand remonte ce goût pour la lecture ?
A l’âge de 5 ou 6 ans, j’avais déjà lu quelques romans de Conan Doyle. Sherlock Holmes était mon héros, mon modèle. Plus tard, j’ai abandonné la lecture, jusqu’à mon entrée au lycée… Quand je suis passé en première, je suis tombé sur un prof génial : un passionné qui m’a redonné goût à la lecture en commençant par Les Raisins de la colère de Steinbeck. Je me souviens avoir cherché tous les moyens pour ne pas le finir, tant je m’étais impliqué dans cette histoire, tant chaque personnage était devenu un ami. C’est ce qui me fascine surtout dans les romans : je finis toujours par me sentir étrangement proche des personnages de l’histoire, par éprouver de la tendresse, de la compassion à leur égard. C’est pour moi le premier critère d’appréciation, avant le style, la portée sociologique ou politique d’un livre. Pour toutes ces raisons, mes choix se portent souvent sur les classiques. En ce moment : Les Papiers posthumes du Pickwick Club de Charles Dickens, son deuxième roman. J’ai presque tout lu de Dickens, mais celui-ci reste mon favori, à cause de son humour et de l’énergie qu’il dégage Dickens était très jeune à l’époque. Auparavant, j’avais lu L’Ami commun, son dernier roman achevé. Il est aussi très drôle, mais avec en plus une espèce de sagesse, de mélancolie : la psychologie de ses personnages y est beaucoup moins sommaire que dans ses premiers livres, dont l’humour fonctionne surtout grâce au ridicule des situations dans lesquelles les personnages sont placés.
Ta passion pour les livres te laisse-t-elle assez de temps pour le cinéma ?
J’y cherche la même chose que dans la littérature ou la musique : des figures singulières. C’est pour cette raison que l’histoire importe assez peu pour moi. En fait, ce sont surtout les acteurs qui me fascinent : j’ai adoré voir à nouveau Peter Fonda à l’écran dans Ulee’s gold de Victor Núnez, comme j’irais voir n’importe quel film dans lequel jouerait Peter Sellers. Dans le même registre, la carrière de Clint Eastwood m’impressionne par son intégrité. Honkytonk man, où il interprète un chanteur country, est un film qui m’a bouleversé. Lui, je l’admire avant tout en tant qu’homme : je suis persuadé que c’est un mec bien et j’aimerais lui ressembler un jour.
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Ron Sexsmith Other songs, (Interscope/Universal).
Frédéric Valion
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