Un nouveau lieu vient d’ouvrir à Alfortville, en proche banlieue parisienne, et sous l’égide du metteur en scène Christian Benedetti : on peut y voir Sauvés, premier texte écrit par Edward Bond, en 1971.
Décidément, cette rentrée sera Bond ou ne sera pas. Il faut dire qu’à l’heure où l’on découvre chaque jour un peu plus effrayé un monde où la violence est partout, les criminels de plus en plus jeunes et les guerres toujours là, en bref, un monde qui ne tourne pas très rond, son oeuvre devient de première nécessité. « Je veux montrer au public qu’ils sont les agents de leur propre destruction, et que cela ne peut s’accomplir que par la destruction d’autrui et donc qu’ils sont coupables. » Une profession de foi que l’on retrouve dans toutes ses pièces.
Les Sauvés en question sont perdus pour tous. Quelque part en Angleterre, une famille ouvrière. Le père et la mère s’entretuent lentement, usant du silence qui s’est installé entre eux comme d’une arme atomique. Leur fille ramène ses conquêtes sur le canapé du salon. Il y en a un qui s’accroche, s’incruste dans la « famille », la fille lui file sous le nez, s’acoquine avec le voyou du coin, lui reste avec un leitmotiv : aider. Tous ont en commun un esprit de fatalité, menant leur destruction bon train et y entraînant si possible les autres. La victime physique en sera un bébé, tué, collectivement, gratuitement, dans un monde où paradoxalement tout coûte. La mère s’inquiétera d’ailleurs du prix que l’on a pu tirer du landau… Le pire est que l’on a presque envie de dire « sauvé » !, lui au moins échappera aux horreurs promises.
Christian Benedetti a visiblement pris le parti d’un théâtre conventionnel et réaliste basé sur une lecture au premier degré des événements qui constituent la pièce. Les acteurs, excellents, jouent sur le même registre du réel. D’une certaine manière, c’est tant mieux. Les moyens financiers de Benedetti ne lui permettant pas d’avoir la folie des grandeurs, la version documentaire fonctionne. Les trois heures de spectacle dans cette petite salle aux gradins pas franchement ramollis confirment qu’il faut parfois accepter de se tanner les fesses !
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Sauvés, Mise en scène de Christian Benedetti
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